ADOMA : la justice reconnait le droit au travail des salariés
par
popularité : 5%
Résumé des chapitres précédents. Suite à une passation de marché, le 12 novembre 2007 39 salariés du service nettoyage (en CDI avec une ancienneté moyenne de 16 ans) se sont retrouvés, au sens propre du terme, à la porte du jour au lendemain.
ADOMA, par amour du social, a décidé de les remplacer par des rmistes contraints de travailler à leur place pour ne pas perdre leur allocation….Les Bouches du Rhône sont en effet un des 16 départements (et même le premier !) qui se sont portés volontaires pour expérimenter le RSA : résultat garanti…Depuis, les salariés se battent pour retrouver un emploi qu’ils n’auraient jamais du perdre en vertu de la fameuse annexe7 de la convention collective du nettoyage qui oblige une entreprise à reprendre les salariés du marché qu’elle obtient.
C’était ce vendredi 12 décembre le jour tant attendu du verdict.
[1]
On allait enfin savoir…
Dans une salle spécialement réservée à cet effet, les salariés ont pu entendre, dans un silence attentif, pendant près d’une heure la lecture du jugement concernant chacun d’entre eux.
Celle-ci finie, ils sont sortis sans un mot pressés qu’ils étaient de se retrouver entre eux, à l’UL CGT (union locale) du centre ville, à quelques rues du tribunal, pour bien analyser le jugement et les motivations de celui-ci.
Conférence de presse
Pour donner leur sentiment, ils avaient convoqué la presse. Seule La Marseillaise a cru utile de se déplacer. C’est vrai qu’à quelques semaines de Noël il est sans doute plus important de titrer sur les flamants roses de Walt Disney comme a choisi de le faire La Provence, que de le faire sur des salariés du nettoyage sans revenu depuis plus d’un an.
En premier les salariés et leur syndicat ont tenu à rappeler que ce n’était pas eux qui avaient choisi de saisir la justice mais bien ADOMA qui, en demandant leur expulsion, plutôt que d’accepter de s’asseoir à la table des négociations, les avait contraints à ce marathon juridique de plus d’un an.
Ensuite ils ont fait observer, qu’une fois de plus, mais cette fois ci dans un jugement au fond et non plus dans un jugement provisoire de référé, la justice leur a une nouvelle fois donné raison dans leur demande de retrouver un emploi qu’ils n’auraient jamais du perdre.
Sur ce point le jugement est clair, net et sans bavures : les salariés doivent être payés depuis le 12 novembre 2007 et retrouver leur poste dès le jugement signifié. Notant la résistance abusive de l’employeur le tribunal accorde même à chaque salarié 800€ de dommages et intérêts à ce titre.
Dès ce lundi donc ils se rendront à leur poste de travail…Enfin pour ceux qui ont choisi de se battre sur ce terrain là.
La CFTC contre l’emploi
En effet, les salariés défendus par la CFTC (au nombre de 7) ont obtenu ce que leur avocat demandait : leur licenciement ! En dédommagement de celui-ci ils perçoivent chacun, outre le préavis, 10 000€ de dommages et intérêts.
Cela fait donc 7 salariés de moins dans les foyers !
A l’UL leurs collègues étaient unanimes : pas question de faire le travail à leur place. 45 jours de lutte en 2006 pour gagner des embauches, ce n’est pas pour les perdre 2 ans plus tard à la faveur du désistement d’une partie d’entre eux.
L’employeur devra embaucher, la bataille pour l’emploi continue.
Les limites du jugement
Si évidemment les salariés étaient satisfaits de voir leur bon droit reconnu, plusieurs aspects du jugement les laissaient perplexes.
En premier lieu, si on s’en tient à ce jugement, ADOMA est mise hors de cause et ce sont les régies seules qui sont condamnées. ADOMA, donneur d’ordre et responsable de toute cette situation qu’elle a organisée depuis le début s’en tirerait sans dommage ? Les salariés trouvent la pilule amère… Pour justifier leur décision, une demi-ligne a suffi aux juges. Une demi-ligne pour répondre à des pages de conclusion et des constats d’huissiers mettant en évidence la façon dont ADOMA a découragé et fait partir PNS, l’ancienne entreprise aujourd’hui en faillite, a découpé artificiellement le marché pour mieux le donner à de petites entreprises qu’elle pouvait manœuvrer à sa guise, a géré et continue à gérer l’organisation du travail, viole ses propres appels d’offre…Une demi-ligne c’est bien court !
Autre point, le tribunal n’a accordé aucun dommage pour le préjudice subi. Un an d’angoisse, de privation de salaire, de bataille avec les huissiers, bailleurs et créanciers de toutes sortes, ne mérite-t-il pas réparation ? Puisque seuls les licenciés (les 7 CFTC) vont percevoir un dédommagement faut il en déduire que pour le Conseil la bataille pour l’emploi est moins méritoire que celle pour des indemnités ?
Enfin, et ce n’est pas le moins curieux de ce jugement, il y a le cas des salariés du secteur Nord. Ces 14 salariés avaient été repris le 1er juillet 2008 par la régie Nord Littoral, qui s’est ensuite retirée du marché le 1er septembre 2008. Depuis cette date les salariés sont à nouveau sans employeur et ils avaient saisi la formation de référé pour qu’elle désigne un employeur, ce qu’elle n’a pas fait, préférant s’en remettre au jugement du 17 novembre. Contre toute attente et toute logique, le tribunal a considéré que la régie était employeur au-delà du 1er septembre sur un marché qu’elle n’a plus et pour lequel un nouvel appel d’offre vient d’être lancé !!
On le voit, si les salariés ont marqué un point très important, la bataille est loin d’être finie, d’autant qu’il y aura sans doute appel. Bien sûr la situation serait plus claire si, suivant la CGT, le conseil avait condamné, au moins solidairement, ADOMA. C’est justement ce qu’il n’a pas voulu faire, de peur sans doute de se mettre à dos les gros poissons du MEDEF.
A travers le cas de 39 salariés du nettoyage, cette lutte et ce procès posent tout le problème de la sous traitance et des responsabilités respectives dans la chaine d’organisation du travail. Le tribunal n’a pas voulu se prononcer sur cette question quitte à laisser des zones d’ombres et à rendre une décision partiellement injuste. Les salariés l’ont bien compris qui se rendent ce lundi à leur poste, les yeux grands ouverts.
[1] Voir dans cette même rubrique les épisodes précédents de ce Dallas social
SONACOTRA la sale attitude
ADOMA une longue histoire d’amour (I)
ADOMA de plus en plus sociale (II)
ADOMA une longue histoire d’amour (III) : ADOMA déboutée !
ADOMA une longue histoire d’amour (IV) : Y a-t-il un donneur d’ordres dans la salle ?
ADOMA une longue histoire d’amour (V) : ADOMA condamnée !
ADOMA de plus en plus sociale
ADOMA une longue histoire d’amour (VI) : Qui aime bien châtie bien
ADOMA une longue histoire d’amour (VII) : L’amour vache !.
Une longue histoire d’amour (VIII) : Les mystères de l’amour.
Les délits de l’amour ou les drôles de pratiques d’ADOMA (IX).
Audience et parcours champêtre (X).
Une longue histoire d’amour (XI) 45€.
Une longue histoire d’amour (XII) En attendant le 17 novembre.
Une longue histoire d’amour (XIII) En attendant le 12 décembre.
Commentaires