Qatar : la face cachée de la Coupe du Monde 2022
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Quand il ne finance pas des guerres civiles en Syrie ou en Lybie, la Qatar utilise sa richesse pour des projets pharaoniques qui n’ont pas grand chose à voir avec le bien de l’humanité...d’autant qu’ils reposent sur une organisation qui fait penser à l’utilisation des esclaves dans l’antiquité...
Et cela sans que la fameuse communauté internationale, celle qui délivre les bons et mauvais points en matière de démocratie ne s’en émeuve : mais que fait donc BHL ?
Vite téléphonez lui il ne doit pas être au courant...
En plein Euro de foot, l’association Human Rights Watch vient juste de publier un rapport de 150 pages sur les conditions de travail des ouvriers pour l’essentiel immigrés qui oeuvrent à la construction du paradis artificiel et footballistique qui doit accueillir la Coupe du Monde 2022 au Qatar. Si les investissements financiers sont estimés à 160 milliards de dollars, impossible d’évaluer le coût humain de ce projet pharaonique dont le riche émirat pétrolier se soucie fort peu.
Une Coupe du Monde achetée par les pétrodollars et le lobbying bienvenu mais pas gratuit de stars comme Zidane ou Guardiola, des stades démontables, construits au milieu de nulle part climatisés à l’énergie solaire, un événement mondial organisé dans un pays grand comme le département de la Gironde dont la passion pour le foot fluctue au gré des coups de coeur du Cheikh Al Thani et des placements du fonds souverain qatari.
Selon le rapport de Construction News qui regroupe les analyses d’un spécialiste allemand de la finance, l’organisation du plus grand évènement sportif de la planète devrait coûter 160 milliards d’euros environ à l’émirat qatari : 124 milliards d’euros pour les stades et 36 milliards pour les infrastructures de transport. Rien que la climatisation dans les stades (pour régler ce fameux problème de chaleur) devrait couter 35 milliards d’euros. Enfin, une ville entière nommée Lusail sera créée. Elle surplombera le stade qui accueillera le match d’ouverture et la finale. Montant de la facture : 32 milliards d’euros.
Des milliards que ne verront pas à coup sûr les ouvriers migrants qui n’auront pas plus l’occasion de voir le début d’un match de foot mais s’affairent déjà à la construction de ce paradis footballistique artificiel sous des températures caniculaires et dans des conditions de travail déplorables. Au-delà du coût financier du joli jouet que s’offre l’Emirat, l’association s’est intéressée au coût humain de ce projet pharaonique.
Les travailleurs migrants représentent 94% de la population du pays. Le ratio le plus élevé au monde. Et le pays, peuplé de 1,6 millions d’habitants entend encore recruter jusqu’à un million de travailleurs migrants au cours de la prochaine décennie afin de construire les fameux stades et infrastructures nécessaires à l’accueil de la Coupe du Monde 2022.
Une "clause de non-concurrence" pour des ouvriers exploités
Dans un rapport de 146 pages, l’association examine les systèmes de recrutement et d’emploi, véritable source d’exploitation de ces ouvriers venus pour la plupart d’Asie du Sud-Est. Pas question de faire trimer un qatari.
Confiscation des passeports, contrôle abusif des travailleurs, restriction au droit du travail (difficile de quitter son emploi), sans compter les obstacles à la communication des plaintes auprès des services gouvernementaux, salaires impayés, retenues salariales illégales, campements de travail insalubres et surpeuplés.
Human Rights Watch a constaté que le Qatar, érigé dans nos contrées en bienfaiteur médiatico-footballistique, possède l’un des codes du travail les plus restrictifs : impossible de changer d’emploi sans l’autorisation de son employeur -une clause de non-concurrence pour les ouvriers exploités, il fallait y penser-. Même chose pour quitter le pays, le travailleur doit obtenir un « permis » de son employeur. La nuance avec la notion de travail forcé n’est pas très grande.
Dans la région, seule l’Arabie Saoudite a mis en place ce « permis de sortie ».
Le système de recrutement est pour le moins original : les postulants doivent payer des frais de recrutement [1], dont les montants varient selon l’enquête de HRW de 726 à 3651 dollars, le tout payé sur emprunt à des taux d’intérêts qui peuvent aller jusqu’à 100% par an !
Travailleur venu du Bangladesh Mahmoud qui a emprunté 3298 dollars explique que s’il ne parvient pas à rembourser, « la banque sortira ma famille de la maison ». Ainsi la plupart des ouvriers hypothèquent leur maison dans leur pays d’origine pour trouver un emploi au Qatar.
Si l’Organisation Internationale du travail autorise la libre association, les lois du Qatar interdisent de se syndiquer. « La proposition récente du gouvernement d’une Union des travailleurs ne parvient pas à satisfaire aux exigences minimales de la libre association dans la mesure où tous les postes de prises de décisions sont réservés aux citoyens qataris » constate Human Rights Watch.
Carton jaune pour le Qatar et la Fifa ?
Dans une lettre à Human Rights Watch, les fonctionnaires du ministère du Travail ont répondu que « le ministère n’a reçu aucune plainte du travail forcé et il est inconcevable qu’une telle chose existe au Qatar, où le travailleur peut rompre son contrat, retourner dans son pays quand il le souhaite et l’employeur ne peut pas le forcer à rester dans le pays contre sa volonté ».
Le rapport aborde les préoccupations au sujet de la sécurité des travailleurs dans l’industrie de la construction du Qatar. Il met en lumière des divergences inquiétantes entre le nombre de décès signalés par les travailleurs de la construction des ambassades locales et le nombre déclaré par le gouvernement. L’ambassade népalaise a dénombré 191 décès de travailleurs népalais en 2010, et l’ambassade indienne 98 de migrants indiens. De nombreux décès seraient dus à des insuffisances cardiaques au moment des fortes chaleurs.
De son côté le ministère du Travail ne dénombre pas plus de six décès au cours des trois dernières années.
L’Etat du Qatar, qui s’est engagé à améliorer les conditions de travail de ses ouvriers sans fournir d’indications claires sur les réformes envisageables, n’est pas seul en cause, le comité organisateur et la FIFA s’étaient engagés au moment de l’attribution de la Coupe du Monde à être attentifs aux droits des travailleurs. Jugée complice d’une mondialisation inéquitable, en 2010, des syndicalistes avait tenté de brandir en vain un carton jaune lors d’une réunion de l’ONU pour dénoncer la passivité de la FIFA face au non respect du droit du travail lors des préparatifs de la Coupe du Monde en Afrique du Sud. Bis repetita ?
Par Régis Soubrouillard Marianne 2 le 14/06/2012
Transmis par Linsay
[1] comme cela se fait en France pour les travailleurs OMI NDR
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