L’austérité, une pilule qui passe mal
popularité : 5%
40 000 Roumains ont manifesté, le 19 mai, dans les rues de Bucarest, lors de la plus grande manifestation populaire depuis la chute de Nicolae Ceausescu, en 1989. Face à cette colère, les médias sont partagés
.
« Le 19 mai à Bucarest, sur la place de la Victoire, à coté du désespoir des gens, il y avait un autre sentiment qui flottait dans l’air : le mépris », écrit Gândul. Les manifestants, venus de tout le pays reprochaient au gouvernement, qui compte réduire de 25 % les salaires des fonctionnaires et de 15 % les retraites, « d’avoir manqué à ses devoirs, en cachant la crise », explique le quotidien de Bucarest. Qualifiées de « priorité absolue » par l’exécutif, les mesures gouvernementales sont la contrepartie du prêt accordé, il y a un an, par le Fonds monétaire international.
Si pour ce quotidien bucarestois « les retraités ont toutes les raisons de se révolter, car quatre sur cinq ont des retraites si faibles qu’on se demande comment ils réussissent à survivre », pour Evenimentul Zilei, les Roumains font face « aux rigueurs du capitalisme dans sa version locale ». Mais, « semblables aux Juifs conduits par Moise dans le désert, les Roumains égarés dans la transition ne comprennent pas les rigueurs du redressement économique et ni l’austérité », continue l’écrivain Mircea Cartarescu dans Evenimentul Zilei. Néanmoins, tout cela est logique. « Les manifestants ont défilé avec les portraits de Ceausescu, nous avons entendu les slogans d’antan, car dans un monde qui ne donne aucun espoir, on part à la recherche du temps perdu. Quand le réel ne t’offre pas de solutions, tu te réfugies dans le mythe ».
L’hebdomadaire Revista 22 est, quant à lui, plus tranchant. « Reconnaissons qu’en Roumanie on gagne mieux que ce qui est écrit dans les statistiques et que nous en profitons pour manquer à nos devoirs sans honte. Tout le monde en profite. Pauvres ou riches sans oublier les millions de personnes qui trompent le fisc et dont le nombre ne cesse d’augmenter. Nous le savons tous. Le fait que nos gouvernants sont parfois corrompus et lâches n’est pas une excuse pour le fait que nous fraudons, que nous pratiquons la contrebande ». Mais Revista 22 affirme que cela ne sert à rien de culpabiliser « la droite, le président, le Premier ministre, les libéraux » avant d’ajouter que « nous finirons par trouver les coupables. Mais c’est tellement plus simple et plus réconfortant d’injurier tout le monde, tous les autres, car, comme disait Sartre, l’enfer sont les autres ! »
Par Iulia Badea Guéritée Courrier international le 21/05/2010
Transmis par Linsay
Commentaires