L’UE et la Hongrie : colonisation, désindustrialisation et déstructuration
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Avec l’adhésion des pays d’Europe de l’Est, les dirigeants européens, sans avertissement, ni déclaration formelle, ont modifié le projet d’intégration européenne. Au lieu de mettre en place un programme de développement et d’intégration économique avec un plan de finance à long terme, l’élargissement de l’UE a créé une division territoriale durable entre deux catégories de pays.
Les pays d’Europe de l’Est - qui totalisent pourtant 100 millions de personnes - sont pris au piège en tenant le rôle de pays sous-développés.
Sans le dire ouvertement, la Commission a imposé une zone de libre-échange, et ces pays n’ont plus aucun contrôle sur leur propre évolution. Au nom de la concurrence et de l’efficacité, l’Union a exigé une privatisation rapide, l’ouverture des frontières et une politique libérale, bien au-delà de ce qui s’est produit pour les membres historiques de l’UE. Afin de décrire la situation des derniers arrivés, les mots « colonisation », « désindustrialisation » et « déstructuration » ne sont pas trop forts.
En Hongrie, l’agriculture et l’industrie ont été entièrement privatisées. Les nouveaux propriétaires - souvent des multinationales - étaient d’abord intéressés par les opportunités, non pas par la production, ce qui a conduit à la fermeture de nombreuses usines. Prenons l’exemple de la fabrication du sucre : alors que le pays comptait six usines, il n’y en a plus une seule depuis que le secteur a été privatisé. Et tout le sucre doit être désormais importé.
La situation sociale est tout aussi désastreuse. La Hongrie est un pays de dix millions d’habitants, et depuis 1990, 1,4 million d’emplois ont été supprimés, ce qui représente plus d’un quart des emplois réguliers. En retour, le travail non-réglementé représente entre un quart et un tiers de l’activité économique du pays. Des centaines de milliers de travailleurs travaillent au noir, sans aucune protection. Leurs conditions de travail et le nombre d’heures ne sont pas réglementés. Ils ne cotisent pas pour leur retraite, ni pour la sécurité sociale.
La conséquence directe est une baisse des recettes provenant de ces revenus. Le pays est dans une spirale sociale négative. Au nom des budgets équilibrés, l’UE fait pression sur la Hongrie pour réduire drastiquement les avantages acquis sous le régime socialiste et privatiser sans fin tandis que la pauvreté augmente chaque année.
La sous-traitance industrielle, qui crée une concurrence entre les travailleurs d’Europe centrale et orientale avec ceux des pays les plus anciens de l’Union, est basée sur cette combinaison de faibles salaires et de travail illégal. Les multinationales embauchent aux conditions locales, régulières, mais sur un marché du travail non-réglementé. La désindustrialisation, qui a suivi la privatisation et le démantèlement des services sociaux, a créé un environnement économique qui fait de la Hongrie un pays fournisseur de main-d’œuvre bon marché. Cela ne peut pas créer une structure industrielle viable et cohérente. Cela n’offre aucune perspective pour le peuple magyar. C’est une impasse pour le développement.
En Hongrie, l’État providence a disparu ou est en voie de disparition. La structure socio-économique est une source de tension permanente, mais aussi d’instabilité durable car cette dynamique de développement ne peut pas aider le pays sortir de cette impasse. L’écart de niveau de vie entre les deux parties de l’Europe crée des tensions et déstabilise la construction de l’Union. La crise financière aggrave encore la situation budgétaire de chaque pays sans aucune solution en vue, pas même dans le long terme. Cette crise systémique est un appel ouvert à la réflexion sur le projet même de l’Union comme région de stabilité et de bien-être.
Par Judit Morva le 15/12/2009 Traduit par Cédric Rutter pour Investig’Action
Transmis par Linsay
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