« Une prison digne d’une dictature » : un rapport épingle l’enfer des Baumettes à Marseille
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par Pierre Isnard-Dupuy pour Bastamag
En pleine grève des surveillants, l’ONG Confluences dévoile un rapport choc - dont Bastamag a eu la primauté - sur les atteintes aux droits humains dans le centre pénitentiaire des Baumettes à Marseille. La promiscuité et les conditions sanitaires déplorables y entraînent violence, suicides, maladies, dégradation de la santé mentale des détenus et grèves de la faim. Typique de l’inhumanité des prisons à l’ancienne, le bâtiment historique doit être détruit et remplacé par Baumettes 3, installation moderne et digne selon les autorités. Sauf qu’à Baumettes 2, ouvert en mai, les conditions de détentions posent déjà de nouveaux problèmes.
En bloquant l’accès aux prisons depuis une dizaine de jours, les surveillants pénitentiaires grévistes ont su attirer l’attention sur leurs revendications. L’affichage de leurs difficiles conditions de travail et des agressions subies, à l’origine du mouvement, rend cependant peu compte d’autres problèmes de fond à l’œuvre dans le système carcéral. Insalubrité, surpopulation, atteinte aux droits fondamentaux... le malaise touche depuis longtemps les détenus, et pose la question du respect des droits humains par les autorités françaises.
C’est dans ce contexte que ce 24 janvier, Confluences, une ONG qui agit « pour la promotion et la défense des droits humains » dévoile publiquement un rapport d’enquête sur le centre pénitentiaire de Marseille. « C’est une prison digne d’une dictature. Je ne m’attendais pas à constater une telle situation dans un État de droit », fustige Rabha Attaf. La directrice de Confluences est également journaliste, grand reporter sur les droits humains dans les pays arabes.
Depuis mai 2017, les trois enquêtrices de Confluences, soutenues par la LDH, ont mené leur travail en trois phases. Durant les mois d’été, elles se sont entretenues avec des familles en attente de parloir. De septembre à mi-octobre, elles ont rencontrés des personnels pénitentiaires. Enfin, jusqu’en décembre, elles ont recueillis les témoignages d’intervenants extérieurs.
« Persistance d’une violation grave des droits fondamentaux »
Ouvertes en 1938 dans le quartier marseillais du même nom, les Baumettes est un centre pénitentiaire hors d’usage, pointé du doigt à chaque nouveau rapport. Cette affirmation ne souffre d’aucune contestation pour le bâtiment dit « historique » (BH). L’administration s’est voulue rassurante à l’ouverture du nouveau bâtiment, « Baumettes 2 » (B2), le 15 mai 2017.
Sa construction a était assurée par Vinci, dans le cadre d’un marché de conception-réalisation qui permet à l’État de confier à son prestataire toutes les étapes des travaux, des études jusqu’à la livraison du bâtiment (lire aussi notre enquête : Quand les prisons, les détenus et la politique carcérale deviennent des produits d’investissement).
Baumettes 2 se voulait modèle. « L’air, l’espace et la lumière naturelle, sont le fer de lance du parti architectural de ce projet. C’est une prison qui respire », affirmait l’architecte Guillien Bernard, d’Archi5prod qui en a fait la conception. Quelques mois après la mise en fonction, on est loin de la projection idyllique.
Et « Baumettes 3 », en remplacement du bâtiment historique qui sera détruit au plus tôt à l’été, est en attente pour 2021. Au lieu d’améliorer la situation, le transfert des détenus et des activités vers Baumettes 2 a provoqué de graves dysfonctionnements. Plus globalement, Confluences affirme la « persistance d’une violation grave des droits fondamentaux ».
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