OPINIONS DU MOMENT

lundi 15 novembre 2010
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Je viens d’être accroché par cette phrase d’un texte ancien de Antoine Artous « dialoguant » avec Jean-Marie Vincent après la mort de ce dernier :
« La thématique est celle, lancinante, du retard de la conscience politique et/ou de classe sur les conditions objectives qui, elles, sont mûres. »
Dans mes réflexions de ce jour, ce questionnement est bien présent.
Epuise-t-il les opinions que l’on peut formuler ce jour à propos de l’étape actuelle du mouvement en cours ?
Ce serait certainement un peu court.

AMC VIENT DE ME DONNER SES REFLEXIONS

« Proposition d’éclaircissement :
La classe ouvrière reste mobilisée mais elle est émiettée, disséminée, son mouvement n’est pas unitaire. Et personne n’appelle à aller tous ensemble à l’Elysée, au parlement. Lieux saints intouchables. On respecte le pouvoir et les députés "qu’on a élus". C’est l’opinion des directions syndicales, de la gauche, sans doute de l’extrême gauche gagnée au parlementarisme, et de la plus grande partie des salariés. Aucun site du style de Wikileaks n’appelle à aller tous unis, à 200000...500000, là où d’autres peuples vont spontanément (Islande, Kirghistan, Ukraine, Roumanie...), sans pour autant que cela aboutisse forcément à autre autre qu’à faire tomber le pouvoir en place... mais ce serait déjà ça.
 
Avec les moyens de l’internet, rien de sérieux n’est proposé pour unir ce qui part dans tous les sens. Les plus "révolutionnaires" disent : grève reconductible, grève générale, grève illimitée..... Il faut pouvoir !! La grève épuise, surtout quand elle n’est pas centralisée ; elle le serait par qui ??? Par "les organisations de la classe ouvrière" comme certains disent encore...? Plaisanterie !

A Marseille, où c’est le souk, on ne voit pas de mouvement d’auto-organisation par quartier, pour prendre en main la salubrité, le soutien financier aux grèves, l’acheminement des marchandises, la prise en mains de tous les problèmes ; à Lyon, l’expression libertaire des jeunes me fait penser à la gauche prolétarienne des années 70 : sympa mais....Je ne vois nulle part écrit (mais je n’ai peut-être pas vu) que les syndicats de Lyon ont livré les jeunes à la police le 21-10 et sont partis en "manif" en les abandonnant... aux CRS.

Le pouvoir a donc raison de spéculer sur la fermeté pour faire capoter la grève... et il a raison d’être cynique en ayant exprimé au parlement que l’alignement des retraites des députés sur le régime général, c’était "niet" , pas pour eux !! Juste pour le troupeau, nous !! Il y a une masse de gens hors d’eux, mais personne ne dit "Allons au parlement".
 
Il faut garder la tête froide et réfléchir.

Face à l’horreur de ce que nos gouvernements font dans le monde : guerres à outrance, destructions de territoires entiers,tortures, ventes d’armements, mensonges, travestissements, la gauche et l’extrême gauche ne font rien, et nous sommes passifs. Ces organisations ne sont même pas capables de monter un site du genre de Wikileaks ! C’est un individu, avec des amis qui le fait (mais voilà que son aura lui monte à la tête). C’est hallucinant. Oui, bien sûr, nous disons "on les connait, ils font la même chose que la droite". Mais encore 
 
Ce sont deux faits inédits, non prévus par Marx, ses amis et descendants, qu’il faut examiner :
 
- la gauche, l’extrême gauche (toute aussi productiviste que la gauche), les directions syndicales et le contenu même des syndicats, sont intégrées au système capitaliste ; elles sont intégrés à l’Etat. Ce sont des institutions d’Etat (un "fou" parlait des appareils idéologiques d’Etat il y a 30 ans, mais trop tôt et mal) qui jouent leurs partitions de désaccords obligés, d’unité partielle, de désunion, qui baratinent et nous font perdre notre temps et tout fil conducteur... Institutions de protection du système, de piliers du système. Sans elles, tout s’effondre. Je n’entre pas dans le questionnement "quel rôle a joué l’URSS" dans cette affaire. Mais il faudra y venir.

Depuis quand cette intégration ?? Depuis probablement, qu’avec les guerres coloniales et surtout la dernière guerre mondiale, les bourgeoisies ont pu financer les "acquis sociaux", maintenir la paix sociale, acheter les peuples ( en les rendant xénophobes par la même occasion) grâce à l’immense complexe financier et industriel militaire (complexe militaro-industriel") en tout premier lieu. Ce rôle de premier plan a été caché derrière le rideau, pour laisser causer sur la dite importance de la force du prolétariat et sur les rapports de classes en faveur de ce dernier. Pas faux, mais avant tout, La bourgeoisie pouvait financer en faisant semblant de ne pas pouvoir.... Il a été écrit par une économiste anglaise Joan Robinson que Keynes se retournerait dans sa tombe s’il avait pu prévoir cela. Toute sa théorie du capitalisme réformiste ne reposait finalement que sur ce complexe industriel... 
 
Aujourd’hui, la bourgeoisie financière pourrait toujours financer une sorte de réformisme, elle en a les moyens (elle dit que non bien sûr via la dite "dette publique"), mais elle ne veut plus faire ce que faisait la bourgeoisie industrielle. Ce petit jeu a assez duré. Il serait de bonne guerre que le salariat, lui-même largement intégré, soit mis au pain sec et se retourne par exemple.... contre les masses arabes ou musulmanes.... Depuis 2001, des efforts considérables sont faits en ce sens, c’est beaucoup plus intéressant. Si les uns mangeaient les autres, ce serait pas mal. Sauf que ceux qui dirigent ces masses arabes et musulmanes ne sont pas plus bêtes que nous. Ils n’ont pas l’intention de se laisser faire ni bien sûr d’émanciper les masses populaires sous leur houlette, donc ils les dirigent à l’inverse de nous contre les occidentaux. Et Israël dans cette histoire est une aubaine. 

Tandis que nous nous occupons à cela réciproquement, les grands de ce monde, des "deux camps", se goinfrent de pétrole, entre autres, et nous invitent à défendre leur festin.

Car au-delà de la retraite, que défendons nous actuellement ? La révolution ?? Pas du tout, mais notre petit bout de festin : Le statu quo. Les traites pour la maison, les voitures, nos pompes chéries de carburants, nos grandes surfaces, la grande industrie capitaliste, éventuellement le nationalisme à la Le Pen.... en somme le capitalisme. Une minorité tente de décrire un "autre chose", une autre vie, une autre voie...
 
- L’autre fait inédit a été largement analysé, commenté, entre autres par Chomsky. Il s’agit du formatage largement réussi de nos cerveaux de salariés, par l’industrie colossale dite "La fabrique de l’opinion publique". A ce formatage s’adjoignent les institutions de crédit et le système bancaire. Impossible de séparer les deux. Si le système bancaire n’avait pas été renfloué en 2009, malgré notre haine spontanée et saine des banques, qu’en serait-il du système de crédit ? Qu’en serait-il de nos traites ? De nos petits comptes en banque ? Et de notre traintrain ?
Pensons à l’Argentine de 2001. Pour qu’un formidable mouvement populaire se crée, il a fallu que l’Etat vole tous les comptes bancaires des citoyens. Mais l’Etat s’est reconstitué, en douceur, et il a repris la partie là où il l’avait laissé. Mais les masses populaires savent maintenant comment réagir si d’aventure cela recommençait....
 
Au total, faut-il espérer une centralisation du mouvement actuel contre le pouvoir ? Quels en seraient les agents ?? Pas une organisation ne souhaite cette centralisation ( et même pas le POI qui appelle à sa propre conférence de délégués en décembre (!) pour contrer le gouvernement....!!! Quand tout sera rentré dans l’ordre) et les grandes masses ne semblent pour l’instant pas prêtes à cela. 
Alors, question : comment détacher le peuple de tous les appareils d’Etat ? Comment leur apprendre le mépris du parlementarisme ? De la démocratie parlementaire ? Le mépris de la hiérarchie sociale ? Le mépris total du discours idéologique ? L’irrespect total des dirigeants de l’Etat qui sont des voyous ? La désignation des banques comme des parasites, des cloportes ? Comment leur réapprendre la solidarité à la base, la défense des droits les plus élémentaires au niveau du quartier, de la ville ? L’organisation à la base à tous moments ??

Ceci est en cours. C’est un long apprentissage. Peut-être bientôt, ou un jour, cette organisation à la base imposera une centralisation par ses propres moyens, en banissant tous les appareils d’Etat. Travaillons y. »

AMC le 26-10-10

LA SUITE QUE JE VIENS DE DONNER

"Pour vous faire plaisir en commençant, merci de noter que Marx ne parlait pas de classe ouvrière, en tout cas je n’ai pas encore trouvé, mais de prolétariat et de classe salariée.

Ici, ce jour, il y a un mouvement social et politique qui se situe dans la période post-fordiste, mais elle-même assez avancée, donc pour le mouvement, une certaine expérience concrète de ce post-fordisme. Et, justement, je me proposais d’en faire le thème de mes prochains papiers, il y a notamment la mythisation du travail qui s’ajoute aux autres fétichismes, dont celui de la marchandise....

Où en est le mouvement social ?
Je reprends les choses d’assez loin, ce me semble nécessaire pour essayer de comprendre, le mouvement ne naît pas, et ne finit pas non plus, avec le mouvement actuel....

Le mouvement social, après les années d’endormissement mitterrandiennes, a repris l’offensive avec le référendum sur Maastricht, j’ai déjà écrit cela.
C’était en 92.

Le mouvement offensif s’est poursuivi sous différentes formes, ne pas oublier toutes les formes que peut prendre le mouvement, économiques, sociales, politiques, voire théoriques, comme vous le dites avec Althusser.
Mais il est d’autres personnages, voyez par exemple du côté de Jean-Marie Vincent, dommage qu’il se soit partagé entre trotskysme, NPA...

Donc, après 92, 95 puis 1997 et la "victoire de la gauche plurielle", puis la déception qui sanctionne fort en 2002, vous ne croyez pas que cette sanction était une forme de lutte, et même une forte forme de lutte !

Puis 2005 et le coup d’Etat contre la victoire du peuple ! Parce que le peuple avait gagné ! Et toutes les forces politiques lui volent la victoire ! Oui, c’est l’intégration, c’est déjà l’intégration au système, même si des moyens sonnants et trébuchants peuvent aider le mouvement de l’économie et de la société lui-même à intégrer ! Et ce ne sera ni la première, ni la dernière des fois, foi de voile intégral !

Dans le prolongement, c’est 2007 et la "gauche" détruit totalement les avancées du mouvement populaire de 2005, et c’est donc la victoire de Sarko, même si ce sont les mêmes capitalistes et leurs médias qui sont à l’origine des deux principales candidatures.

Mais le mouvement se ressaisit aux élections européennes de 2009 : 60% pour le boycott !
Tout est fait pour minorer publiquement la signification et la portée des 60% du boycott, nouvelle forme de lutte, nouveau moyen de dire ce que l’on pense du système et de ses institutions, y compris donc européennes !

Car ces 60% là sont accompagnés des données d’une enquête SOFRESS : 72% des salariés considèrent le capitalisme comme négatif. Je ne sais trop s’il s’agit là de condamner le fordisme ou le post-fordisme, en tout cas c’est un précédent historique ! Et personne n’est venu me contredire lorsque j’ai annoncé cela .

Et "rebelotte" à l’occasion des régionales de début 2010, même si leur caractère est quelque peu différent. En tout cas 54% de boycott !

Cela correspondait aussi à une montée des luttes, des luttes sur des sujets les plus divers, ce sont tous les aspects de la vie de la société qui sont concernés ! Et donc ce qui vient, c’est la jonction de toutes ces luttes qui, ensemble, portent la nécessité du changement de société contre le capitalisme !

Aussi, avec ces résultats, venant après ceux de 2005, et même s’ils ont réussi alors à "noyer le poisson", l’inquiétude est très grande dans les principales forces politiques et dans les milieux économiques et financiers.
Ils sentent bien ce qui monte, et ce qui monte peut porter très loin, d’autant, il ne faut pas l’oublier, que la crise est là, qu’elle s’approfondit, et qu’on ne sait quand et où elle pourrait s’arrêter.
C’est même la panique, un symbole fort quand Soros demande un rendez-vous au plus fameux marxiste de Grande-Bretagne pour que, justement, il lui parle de Marx ! On mesure où ils en sont !
La panique donc, mais on n’y cède pas. La contre-offensive s’organise, se pense, il faut une grande mise en scène, quelque chose que l’on a jamais vu, même si on a eu Hitler et l’incendie du Reichstadt et Bush et les tours de New-York !

Donc une grande mise en scène, une provocation énorme, un piège immense au mouvement populaire, bien gros pour que ce soit crédible, et avec tous les acteurs nécessaires, on les connait bien, ils ont déjà donné !
Il faut donc choisir un sujet sensible, susceptible de mobiliser, de faire bouger en profondeur ! Et il faut faire beaucoup bouger pour "tuer" cette nouvelle montée du mouvement populaire et préparer la nouvelle étape suivante : les élections présidentielles !

Les retraites sont donc le thème du piège choisi, on est sûr que cela va marcher, et cela marche ! Cela marche même beaucoup ! Et le mouvement populaire va se faire "balader" !
Je le pressens, mais je ne peux aller jusqu’au bout. J’ai dit des choses, y compris avec d’autres, y compris sur la nécessité de l’organisation indépendante, les comités de base ! Et la nécessité de la démocratie directe.

Mais le mouvement n’est pas mûr pour cela, il a trop confiance, il ne voit pas le piège. Il y a encore des "rets", les dirigeants jouent à souhait le double jeu, ils avancent et ils retiennent, c’est du très grand art, ils peuvent tromper, et trompent encore beaucoup de monde, ils peuvent laisser penser que l’on est encore dans le fordisme, alors que le capital ne peut plus se permettre "les cadeaux" qu’il octroyait alors !

On ne peut encore tirer les conclusions, certes beaucoup de militants ont senti le double jeu, deviné le piège, sans tout piger nécessairement.
Je crois que la rogne, sinon la colère, vont être grande, mais c’était aussi l’objectif, Sarko et DSK, dans l’immédiat, chacun y trouve son compte.
Tout de suite, on ne peut tout dire, le risque d’être incompris est réel.
L’idée essentielle : l’organisation, les comités..
J’ai quand-même une certitude : il faudra un peu de temps au mouvement pour digérer mais il retrouvera vite ses couleurs, un mouvement qui vient de si loin ne peut s’arrêter ainsi.



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mercredi 17 novembre 2010 à 00h17 - par  Michel Peyret
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mardi 16 novembre 2010 à 08h41 - par  cadran anthony

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