Règlement de compte à Buffalo Grill.

Ou les méthodes de gangster d’une direction qui n’aime pas la CGT.
dimanche 28 novembre 2010
par  Charles Hoareau
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Gilles et sa femme Sandrine travaillent à Buffalo Grill, entreprise de restauration dont le nom finalement bien choisi évoque à la fois le massacreur sans scrupules de milliers de bisons (animaux que les indiens respectaient et consommaient alors avec sagesse et parcimonie) et une direction qui tire sur les salarié-e-s sans retenue.

Gilles travaille depuis janvier 2002, Sandrine depuis 2007. Gilles y est devenu « manager » selon le terme consacré dans cette entreprise qui, sans doute pour être davantage dans l’ambiance western en hommage à ces dignes conquérants de l’Ouest qui ont commis l’un des pires génocides de l’histoire, ne veut pas employer le mot gérant ou directeur de restaurant.
Buffalo Bill, les tueurs d’indiens, le pays numéro 1 mondial d’un capitalisme éhonté semeur de guerres et de destructions : on rend les honneurs à qui on veut.

En 2004 Gilles est muté au restaurant Buffalo du Vieux Port à Marseille. Sa femme le rejoint un peu plus tard. Un appartement situé au 1er étage au-dessus du restaurant leur est attribué par l’entreprise.

En 2008, Gilles est élu délégué du personnel CGT par la quasi-totalité du personnel du restaurant ce qui évidemment ne plait guère à son employeur. Cela plait d’autant moins que la CGT le désigne délégué syndical cadre et qu’à ce titre Gilles se met à rencontrer les directeurs de nombre d’autres restaurants de l’enseigne. Pire pour l’enseigne, aux élections d’octobre 2010 Gilles est présenté par la CGT tête de liste du collège encadrement au CE national et Sandrine comme déléguée du personnel de l’établissement marseillais.

La direction décide alors de passer à l’offensive et lance une machination de grande envergure.

-  A quelques semaines de l’élection un salarié est muté à Marseille et à peine arrivé se déclare candidat comme délégué du personnel sous l’étiquette FO. Il y a des vocations syndicales aussi surprenantes que spontanées.

-  Quelques jours avant le vote, alors que Gilles et sa femme sont en repos et absents de leur domicile, ils sont prévenus par un des employés que le DRH national, plus la directrice régionale, plus un huissier se sont présentés au restaurant et qu’en toute illégalité leur appartement a été fracturé. [1].

-  Arrivés sur place Gilles et Sandrine qui n’en croient ni leurs yeux ni leurs oreilles se voient signifier une mise à pied conservatoire…et l’interdiction de rentrer dans leur appartement dont les serrures – comme celles du restaurant – ont été changées dans l’intervalle !!

Pour la direction, qui ne produit bien sûr aucune preuve, le couple se serait rendu coupable, d’avoir servi de la viande périmée et d’avoir harcelé moralement des ( ?) salarié-e-s.
Buffalo, maintes fois condamné par les prud’hommes, mise sur le grill pour avoir embauché (et débauché) des dizaines de travailleurs sans–papiers, serait subitement devenu un ardent défenseur des salarié-e-s ? Etonnant non !

Quant à la viande avariée, Buffalo, qui a justement été il y a peu au cœur d’une affaire de ce genre dénoncée par la CGT, est un peu mal placé pour avancer cet argument.

Evidemment Gilles et Sandrine, le moment de stupeur passé, nient tout en bloc. La ficelle est énorme. Qu’importe la direction ne compte pas en rester là.

-  Pendant les quelques jours qui séparent la casse de l’appartement du vote des salarié-e-s la directrice régionale prend une chambre dans l’hôtel situé juste en face le restaurant et reste en permanence dans le restaurant.
-  Ils sont un par un convoqués et menacés de prison (sic !) s’ils se rebellent ou marquent leur soutien au couple maudit.
-  L’appel à voter conforme aux vœux de la direction est martelé à chacun…chantage à l’emploi à l’appui. Et le résultat ne se fait pas attendre, Sandrine n’obtient pas (de peu) la majorité des voix des 13 votants du restaurant.

De son côté la CGT ne reste pas inactive. Un rassemblement de soutien est organisé devant le restaurant. Dans son désir d’expédier l’affaire et les salariés la direction convoque un CE extraordinaire dans un hôtel 3 étoiles…à Marseille à 2 pas du restaurant. Bien mal lui en a pris car les élus ont alors reçu à l’heure la visite en fanfare [2] des militants du coin et le CE a été reporté.

Si la pression de la direction a produit ses effets au Buffalo du Vieux Port il n’en est pas de même au plan national où la CGT réalise un score et une percée historiques devenant, tous collèges confondus, la 1re organisation syndicale avec 38% des voix. Et Gilles en tant que cadre va donc pouvoir siéger au CE.

Qu’à cela ne tienne, réunissant à nouveau l’ancien CE où la CGT n’était pas majoritaire la direction obtient un avis favorable aux deux licenciements de la part d’élus qui avaient pourtant déclaré le contraire à Marseille. Une vengeance suite au résultat des élections ?

Un premier tract a été distribué à la clientèle potentielle du restaurant. Il n’a pas été sans effet et une part non négligeable d’entre elle a rebroussé chemin.

Gilles et Sandrine ont saisi la justice pour pouvoir récupérer leur appartement et les affaires qui sont à l’intérieur. Le jugement sera rendu sur ce point dans les jours qui viennent.

Seront –ils entendus ? La CGT qui, depuis ce coup de force digne d’une attaque de diligence, ne cesse de dénoncer ces faits et d’alerter, l’espère.

De son côté l’inspection du travail doit se prononcer sur ces méthodes de voyou et un rendez-vous est prévu ce mardi à la direction du travail du siège de l’entreprise.

Affaire à suivre donc…de pied ferme.
Quoiqu’il en soit à Buffalo Grill, sur le Vieux Port ou à Paris la lutte ne fait que continuer.


[1Les circonstances de cette affaire sont tellement incroyables que la police n’a pas voulu prendre la plainte de Gilles – ce qui l’a obligé à écrire directement au procureur – ne voulant pas croire qu’un huissier – auxiliaire de justice – avait pu assister sans mandat, ce qui était pourtant le cas, à une voie de fait sans s’y opposer ou la dénoncer

[2au sens propre comme au sens figuré ce qui a été du plus bel effet dans l’établissement peu habitué des mégaphones et autres chorales populaires



Commentaires

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vendredi 1er juin 2012 à 00h32 - par  Charles Hoareau
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jeudi 31 mai 2012 à 16h37 - par  Jonathan


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