Israël continue l’occupation et s’expose au boycott

lundi 3 août 2015
par  Romain
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L’état d’Israël poursuit sa politique illégale d’expansion et d’occupation en Cisjordanie. L’association BDS (boycott, désinvestissement, sanctions) n’hésite pas à dénoncer une situation d’apartheid. Ses principaux axes de lutte : la présence opportuniste de firmes israéliennes en zone occupée et les droits des travailleurs palestiniens. Un nombre grandissant d’entreprises et de structures étatiques européennes expriment leur désaccord, voire rompent leurs relations commerciales.
Rouge Midi relaie deux articles du média économique méditerranéen Econostrum, qui illustrent la montée en puissance du boycott depuis ces dernières années.

Israël face au boycott

Le boycott a pris de l’ampleur ces deux dernières années en Israël. Des entreprises européennes se retirent des territoires occupés et de nombreuses associations font campagne contre les produits Israéliens. L’Etat hébreu tente de calmer la situation après le dernier épisode en date, celui avec l’opérateur téléphonique français Orange.

Le boycott économique devient une menace pour Israël. (photo F.Dubessy)

ISRAËL. En 2015 les affaires de boycott et d’utilisation des terres cisjordaniennes par Israël se sont multipliées. Notamment avec l’affaire très récente des déclarations du PDG d’Orange, l’opérateur téléphonique français.

Stéphane Richard, auteur, mercredi 3 juin 2015 au Caire, d’un retentissant « si je le pouvais, je déciderai dès demain le retrait d’Orange d’Israël », se trouvait, vendredi 12 juin 2015, à Jérusalem pour colmater la brèche ouverte par cette phrase mal perçue par les autorités israéliennes comme par les autorités françaises, actionnaires d’Orange.

Lors de cette réunion avec Benyamin Netanyahou, premier ministre israélien, le PDG français avouait « regretter profondément cette controverse » et assurait que sa société « n’a jamais soutenu et ne soutiendra jamais toute forme de boycott contre Israël. » Fin de polémique !

Depuis la fin de la guerre des Six jours, Israël développe des colonies dans la bande de Gaza, et en Cisjordanie. Des emprises jugées illégales par la Convention de Genève et la Résolution 446 du Conseil de sécurité des Nations unies, mais qui occupent aujourd’hui 42% du territoire cisjordanien et où vivent près de 500 000 colons. De nombreuses entreprises Israéliennes s’enracinent dans ces colonies. Ceci n’est pas au goût de tout le monde. Israël, qui parle d’« implantations », argue de son côté qu’aucun statut juridique de ces territoires n’a été établi par un traité de paix.

BDS parle d’apartheid

L’association BDS (Boycott, désinvestissement, sanctions) créée en 2005 par la société civile palestinienne, lutte activement en demandant aux citoyens de pratiquer des boycott autant économique, culturel que sportif et universitaire. Elle dénonce notamment les entreprises israéliennes installées en territoire occupé, et la dépendance des travailleurs palestiniens.

La notion d’« apartheid » apparaît régulièrement sur son site internet. L’association dénonce cette situation et demande une égalité des droits entre les Israéliens et les Palestiniens, le droit au retour des réfugiés et la fin de l’occupation des terres palestiniennes.

BDS cherche tout d’abord à informer. Notamment en ce qui concerne le boycott des produits Israéliens. « De nombreux produits n’ont pas la bonne origine, il existe une dissimulation de l’origine, c’est pourquoi nous demandons aux consommateurs d’être vigilants. » souligne l’association.

Le gouvernement israélien qualifie, quant à lui, cette association d’antisémite. Isaac Herzog, chef de file de l’opposition et de l’Union sioniste (coalition de gauche, centre gauche et du centre), a même évoqué « une nouvelle intifada » en parlant du BDS.

Le boycott d’entreprises européennes

Tout commence avec l’affaire Sodastream en 2014. L’entreprise installée dans une colonie de Cisjordanie, réalise une publicité avec Scarlett Johanson. Cela choque l’opinion publique et la première grande affaire de boycott commence. John Kerry, secrétaire d’Etat américain, et de nombreuses ONG telle que B’Tselem se mêlent de l’histoire qui devient internationale.

Durant l’année 2014 le boycott économique devient plus important. En janvier 2014, le représentant de Bruxelles pour le processus de paix, Andreas Reinicke, annonce que si les négociations échouaient, un étiquetage distinctif des produits des colonies verrait le jour. « Ce qui est contradictoire avec le fait que le parlement Européen et le droit international interdisent les exploitations en territoire occupé » selon l’association.

Peu après, le fond souverain de Norvège bannissait deux entreprises ayant participé à la construction de colonies à Jérusalem-Est et une société d’eau potable néerlandaise cessait sa collaboration avec la compagnie Israélienne Mekorot.

Une menace stratégique

Si le gouvernement israélien tentait de minimiser ce boycott économique, à l’heure d’aujourd’hui, les choses s’inversent. Benyamin Nétanyahou dénonce « une offensive engagée contre l’Etat d’Israël ». Le président Israélien, Reuven Rivlin parle lui, de « menace stratégique ». Ce terme est plus souvent employé pour désigner le Hamas ou l’arme nucléaire.

L’ancien ministre de la Défense de la droite conservatrice, Moshe Arens assure lui que ces boycotts « n’ont eu aucun effet perceptible sur l’économie israélienne ». Mais cette pression inquiète le gouvernement Israélien.

Les négociations de paix avec la Palestine trouvent leur place dans le débat. Une partie de l’Union européenne pourrait boycotter des produits israéliens si les discussions se traduisaient par un échec. Ceci a de quoi alarmer les milieux d’affaires israéliens. Benjamin Netanyahu demande d’ailleurs aux Etats-Unis de « continuer à s’opposer aux boycotts contre Israël . »

Ludivine Tur
Econostrum, 12 Juin 2015


Les agriculteurs israéliens s’inquiètent face aux campagnes de boycott

Les tensions politiques se répercutent sur le secteur agricole israélien. Jusqu’en 2008, le boycott n’a eu d’effet que dans quelques pays. Il semblerait qu’aujourd’hui le phénomène prenne de l’ampleur. Les agriculteurs s’inquiètent pour leurs exportations européennes.

Les exportations des produits issus des colonies pose problème aux Européens (photo © Mehadrin)

ISRAËL / EUROPE. Inon Rosenblum est le patron d’une exploitation agricole familiale implantée depuis 1983 en Cisjordanie, dans la vallée du Jourdain. Les Rosenblum produisent des dattes, du raisin de table et des herbes aromatiques. Au total 600 tonnes par an, habituellement exportées à 97% en France, en Italie, en Angleterre en Allemagne et en Europe de l’Est.

« J’ai perdu cette année 20% de mes ventes vers les pays européens, sans compter que l’Euro a chuté. L ’Angleterre et l’Allemagne restent pour le moment les deux pays qui sanctionnent le plus Israël. Notamment les grandes chaînes telles que Marks et Spencer et Tresco. Mais l’hiver, lorsque certaines références manquent, ils importent à nouveau nos produits. »

Selon Inon Rosenblum, les pays qui appliquent les sanctions ne différencient pas les produits israéliens se trouvant du bon ou du mauvais côté de la ligne verte.

« Bizarrement, lorsqu’un pays boycotte, il sanctionne tous les produits ‘made in Israël’ et pas seulement ceux des territoires situés au-delà des frontières de 1967. Les plus touchés par ces sanctions demeurent les cultivateurs de poivrons de l’Arava, une région qui se trouve pourtant à l’intérieur des frontières reconnues par la communauté internationale. La raison est simple, les principaux acheteurs de poivrons israéliens sont l’Allemagne et l’Angleterre. »

Il poursuit, « moi, j’arrive encore à conserver la tête hors de l’eau car, mes plus gros clients se trouvent en France et en Italie, ces pays n’appliquent pas encore de véritables sanctions économiques à l’encontre d’Israël. Il semblerait que les pays du pourtour méditerranéen soient un peu plus ouverts que les autres. Pour le moment aucun d’entre eux n’a pris de véritables initiatives de boycott. »

Les sanctions menacent l’ensemble des exportations agricoles israéliennes

Depuis dix ans déjà, les produits israéliens provenant des territoires israéliens situés au-delà des frontières de 1967, en partance pour les pays de l’Union européenne disposent d’un code-barres spécial. Aujourd’hui, l’UE souhaite qu’un label « colonies israéliennes » figure sur ces produits, dans les magasins des pays membres.

« Lorsque les Européens veulent boycotter Israël, ils commencent toujours par l’agriculture : les dattes, les poivrons, les mangues et les oranges » confiait Meir Tsur, président de l’Israël Farmers Association et du Moshav Movement, lors d’une interview pour le quotidien Haaretz, le 18 juin 2015.

Des exportations estimées à 100 millions de dollars

Israël ne prend pas à la légère l’activité de BDS (Boycott, désinvestissements, sanctions), le principal organisme international qui tente d’isoler économiquement Israël. Depuis 2011, la Knesset, le Parlement israélien, a même fait passer une loi interdisant aux associations israéliennes militantes de divulguer des informations pouvant renforcer le boycott des produits des territoires situés au-delà des frontières de 1967.

Il est même difficile de connaître le volume exact des exportations agricoles provenant de ces territoires, puisque le gouvernement israélien ne publie aucun chiffre.

En 2012, la dernière année où des chiffres ont été estimés, les exportations industrielles de Cisjordanie, du Golan et de Jérusalem Est, en partance pour les pays de l’Union Européenne, étaient estimées à seulement 100 M$ (90M€), à peine 1 % du total des exportations industrielles israéliennes (à l’exclusion des diamants), vers l’Union européenne.

Comme l’explique Arie Arnon, professeur d’Économie à l’Université Ben-Gourion, même si les marchandises agricoles provenant des territoires exportées en Europe ne dépassent pas au total quelques millions de dollars, chaque année, les économistes israéliens craignent, que le boycott prenne de l’ampleur. « Une fois le label mis en place, le danger est que les chaînes ou magasins européens n’aient aucune envie de s’occuper de l’étiquetage des produits provenant des territoires disputés. Elles préféreront cesser totalement l’importation des produits israéliens. »

Hélène Lesman
Econostrum, 20 juillet 2015




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