Petite histoire du premier mai en images. (II)

Du lendemain de la première guerre mondiale à nos jours.
mardi 1er mai 2018
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Nous republions ces deux articles parus en 2013 sur l’histoire du 1er mai et montrant qu’ ailleurs aussi, mêmes sous des régimes antidémocratiques des hommes et femmes se sont toujours levées pour célébrer le premier mai. Les raisons sont toujours les mêmes : la défense des travailleurs devant la volonté patronale le plus souvent relayée par des hommes politiques aux ordres (suivez mon regard...) et très souvent contre les guerres impérialistes. Prolétaires de tous les pays unissez-vous !

Avec la victoire de la révolution d’Octobre, s’ouvre une période de crise révolutionnaire internationale. La manifestation du 1er Mai 1919 est massive à Paris et prépare les grandes grèves de juin.

« Menschen » (Humains), journal socialiste des travailleurs immigrés à Dresde : « 1er Mai : Vive la Révolution Mondiale »

Avec le développement du mouvement ouvrier révolutionnaire, des manifestations du 1er Mai commencent à être organisées partout dans le monde. En 1920, pour la première fois, une manifestation du 1er Mai est organisée au Japon. 10.000 travailleurs se rassemblent à Tokyo pour revendiquer les huit heures. En 1921, la première manifestation du 1er Mai est organisée à Téhéran. En 1923, le Labour Kisan Party of Hindustan (qui deviendra le Parti Communiste Indien) organise la première manifestation du 1er mai d’Inde à Madras (aujourd’hui Chennai). C’est aussi la première fois que le drapeau rouge est hissé en Inde.

1er Mai 1920 à Tokyo

1 mai 1927 à Helsinki (Finlande)

En Allemagne, le préfet de police social-démocrate Karl Friedrich Zörgiebel décide d’interdire les manifestations du 1er Mai 1929 à Berlin. Le KPD (Parti Communiste d’Allemagne) réagit en appelant à une manifestation massive depuis les quartiers ouvriers au centre de Berlin. Des milliers et des milliers de travailleurs viennent en particulier des quartiers de Wedding et Neukölln. La répression est sanglante : on compte 33 morts, 200 blessés et plus de 1.200 arrestations dans les rangs des manifestants.

Affiche du KPD pour le 1er Mai 1929

Cortège des ouvriers de Wedding, 1 Mai 1929 à Berlin

Une du magazine communiste AIZ après le « Blutmai »

En Iran, le 1er mai 1929 marque le début d’une grève générale qui touche essentiellement les compagnies pétrolières d’Abadan mais aussi des secteurs ouvriers de Mashhad et d’autres villes. Les ouvriers revendiquent la reconnaissance des syndicats, un salaire minimum et la reconnaissance du 1er Mai comme jour férié. Au bout de quatre jours, la grève est brisée avec l’intervention de l’armée. En 1931, le 1er mai marque le début de la grève des ouvriers du textile à Téhéran pour la journée de huit heures, la reconnaissance des syndicats et un jour de congés les vendredis. La grève dure deux semaines.
Avec la peur de la bourgeoisie face à une classe ouvrière qui avait su mener une révolution victorieuse en Russie et la crise du capitalisme à partir de 1929, c’est après l’Italie, en Allemagne et en Autriche que se mettent en place des dictatures fascistes. En Allemagne, les manifestations du 1 mai sont interdites à partir de 1933 et remplacées par une « journée du travail allemand » et c’est au lendemain du 1 mai 1933 que le régime nazi interdira officiellement les syndicats. Au Japon, la dernière manifestation du 1er Mai aura lieu en 1936.

Journal anarcho-syndicaliste clandestin distribué à Dresde à l’occasion du 1er mai 1933

Gravure sur le 1 mai 1934 en Allemagne

Dans bien des pays, les travailleurs manifestent lors du 1 mai 1936 contre le fascisme et pour leurs revendications. Dans l’URSS stalinienne, malgré la terreur, on note des protestations du 1er mai à l’initiative des prisonniers politiques de l’opposition de gauche dans les camps en Sibérie.

Manifestation du 1er Mai 1936 à Varsovie

En France, le 1er Mai 1936 marque la réunification syndicale entre la CGT et la CGTU. Les manifestations massives du 1er Mai préfigurent la grève générale de juin 1936 où la classe ouvrière arrachera des conquêtes comme les congés payés.

Affiche du 1er Mai 1936 (France)

La terreur fasciste n’empêche pas les ouvriers de s’organiser. Ainsi, dans le bassin minier du Pas-de-Calais, on note une agitation sociale autour du 1er Mai 1941. Des drapeaux rouges sont suspendus aux fils électriques, des milliers de tracts sont distribués, et des cahiers de revendications sont rédigés dans tout le bassin minier. Le 3 juin, 80% des mineurs du bassin seront en grève, la répression nazie est particulièrement sanglante : 450 personnes ont été arrêtées, sur lesquelles 244 mineurs sont déportés en Allemagne (130 d’entre eux y trouveront la mort), certains sont fusillés.

Tract fait à la main dans le Pas-de-Calais

Cahier de revendications des ouvriers des fosses n° 9 et 17 des mines de Courrières.

Avec la fin de la guerre et des régimes fascistes, la classe ouvrière reprend ses traditionnelles manifestations du 1er Mai.

Affiche pour le 1er Mai 1946 en Allemagne

Au Japon, avec la fin du régime dictatorial, le 1er Mai 1946 mobilise un million de personnes dans tout le pays et 500.000 à la manifestation de Tokyo. Dans ce pays meurtri par la guerre et les bombardements, les ouvriers réclament à manger et pour ce 1er Mai le slogan principal est « Donnez-nous du riz ! ».

1 Mai 1946 à Tokyo

Dans le contexte de la guerre froide et des menaces d’une nouvelle guerre mondiale, bien des manifestations se dirigent contre la guerre et le militarisme. En 1948, à Stuttgart, se tient sur ces revendications une des plus grande manifestation de l’histoire de la ville lors du 1er Mai.

1 mai 1948 à Stuttgart

Manifestation d’ouvriers juifs et arabes à Ramla (Israël), 1er Mai 1949

Le 1er mai 1950, un appel à la grève générale est lancée contre le régime d’apartheid en Afrique du Sud. La répression policière tue 18 personnes à Soweto .
Le 1er Mai 1952, dans un pays où sévit toujours la misère et où les troupes d’occupation maintiennent à la tête de l’Etat le criminel de guerre Hirohito, la manifestation se dirige vers le Palais Impérial à Tokyo. Des affrontements violents opposent les ouvriers et les forces de répression. Un manifestant est tué, des centaines sont blessés et plus d’un millier sont arrêtés.

1 mai 1952 : Affrontements entre manifestants et forces de répression à Tokyo

Affiche du 1er Mai 1960 : Pour la paix en Algérie (France)

La manifestation du 1er Mai 1968 à Paris rassemble 100.000 personnes selon la CGT. La presse de l’époque souligne la présence « d’éléments trotskistes et anarchistes » ainsi que de fortes délégations de travailleurs immigrés d’Espagne et du Portugal qui manifestent contre les dictatures de Franco et Salazar. Cette manifestation préfigure la grève générale qui suivra et qui inspirera bien au delà des frontières françaises dans les années qui suivent.

Affiche pour le 1 Mai 1969 à Munich : « Pouvoir ouvrier et non partenariat social »

Le 1er Mai 1971 à Washington, des dizaines de milliers de personnes se rassemblent vers la Maison Blanche sous le slogan « S’ils n’arrêtent pas la guerre, nous stopperons le gouvernement » (il s’agit de la guerre du Vietnam). Le lendemain, 2 mai, plus de 17.000 personnes campent encore pour protester contre la guerre au West Potomac Park. Plus de 10.000 soldats fédéraux sont mobilisés pour déloger les manifestants et on comptera plus de 12.000 arrestations les 3 et 4 mai.

1er mai 1971 : Manifestation à Washington contre la guerre du Vietnam

Manifestation du 1 mai 1973 à Santiago (Chili). Unis mais sans armes, les travailleurs chiliens subirons la violence de la dictature de Pinochet

1 mai 1974 à Lisbonne après la chute de la dictature

Si, au cours des années 1970, l’Espagne, le Portugal et la Grèce se libèrent des dictatures militaires, en Turquie, après une interdiction des manifestations du 1er Mai de 1928 à 1975, une manifestation de masse est organisée le 1er mai 1976 par le DISK à Istanbul. Le 1er Mai 1977, 500.000 travailleuses et travailleurs participent à la manifestation. Des groupes paramilitaires ouvrent le feu au niveau de la Place Taksim sur les manifestants. On compte entre 34 et 42 tués et entre 126 et 220 blessés. La police intervient… pour réprimer la manifestation et arrête plus de 500 manifestants dont 98 sont inculpés.

Manifestation du 1 mai 1977 à Istanbul

1 mai 1977 : Massacre de la Place Taksim à Istanbul

1 mai 1977 : Massacre de la Place Taksim

En 1979, après la victoire de la révolution contre le Shah, ce sont 1,5 millions de travailleuses et de travailleurs qui manifestent à Téhéran avec des slogans comme « Vivent les véritables syndicats et les Shorras », « A bas le vieux code du travail », « Du travail pour les chômeurs », etc. A plusieurs reprises des groupes de partisans de Khomeini harcèlent les manifestants et lancent des slogans islamistes et anti-communistes. Les ouvriers répondent en scandant « Les ouvriers seront victorieux, les réactionnaires seront défaits ».

Téhéran, 1979

1 Mai 1980 à Lima (Pérou)

1 mai 1984 à Mansfield (Grande-Bretagne) lors de la grande grève des mineurs britanniques

A l’occasion des 100 ans du 1er Mai, le syndicat sud-africain COSATU appelle à une journée de grève et de mobilisation pour le 1er Mai 1986. Plus d’1,5 millions de travailleurs répondent à l’appel, ainsi que des milliers d’élèves, d’étudiants, de petits commerçants, de conducteurs de taxi et de chômeurs. La mobilisation est particulièrement forte dans le coeur industriel de l’Afrique du Sud, dans la région de Pretoria-Witwatersrand-Vereeniging. Malgré les interdictions, des manifestations et des rassemblements ont lieu dans les principales villes du pays.

1 mai 1986 en Afrique du Sud

En 1991, pour la première fois depuis la contre-révolution stalinienne, le 1er Mai est l’occasion pour les travailleurs de Russie de manifester pour leurs revendications : contre la hausse des prix. En 1993, la manifestation du 1er Mai à Moscou, qui rassemble 100.000 personnes, se termine en affrontement avec les forces de répression.

1 mai 1993 à Moscou

En 1996, malgré l’interdiction, 150.000 personnes participent à la manifestation du 1er Mai à Istanbul. Dès le début de la manifestation, la police ouvre le feu et tue trois manifestants.

Victime de la répression à Istanbul, 1er mai 1996

1er Mai 1996 à Istanbul : Affrontements entre manifestants et forces de répression

Le 1 mai 2001 au Bangladesh est une journée de mobilisation des ouvrières du textile pour la réduction du temps de travail. 10% des usines textile sont fermées par la grève et 160.000 travailleuses sont mobilisées.

1 mai 2001 à Dakha

A partir de 2006, les travailleurs immigrés, essentiellement originaires d’Amérique Latine où le 1er Mai est restée une tradition ouvrière, font du 1er Mai aussi une journée de mobilisation pour la régularisation des travailleurs immigrés.

Manifestation du 1 mai 2006 à New York

En 2007, pour les trente ans du massacre de la Place Taksim de 1977, les travailleurs d’Istanbul veulent se rendre Place Taksim à Istanbul. Les forces de répression interviennent pour bloquer la manifestation. Un travailleur est tué et 700 personnes sont arrêtées. En 2008, la manifestation Place Taksim est une fois encore interdite et les manifestants doivent faire face à la répression policière. En 2009, le 1er Mai est rétabli comme jour férié sous la pression ouvrière, la manifestation du 1er Mai 2010 est autorisée Place Taksim, et en 2011, c’est un demi-million de travailleuses et de travailleurs qui manifesteront Place Taksim.

Manifestation du 1er Mai 2007 à Istanbul

1 mai 2008 à Istanbul

Manifestation du 1er Mai 2008 à Tokyo

Pour le 1er Mai 2009, environ 2.000 personnes se sont rassemblées au Parc Laleh de Téhéran à l’appel d’organisations syndicales et ouvrières d’Iran. Les forces de sécurité du régime des mollahs sont intervenues violemment à coups de matraque et de gaz lacrymogènes contre les manifestant(e)s. Plus de 150 personnes ont été arrêtées. D’autres manifestations ont eu lieu dans d’autres villes du pays comme à Sanandaj, Tabriz, Qom, etc… Une déclaration de dix revendications est adoptées par plusieurs organisations ouvrières.

1er mai 2009 à Sanandaj (Iran)

Avec les révolutions en Tunisie et en Egypte de 2011, les travailleurs ont conquis la liberté de constituer des syndicats, de s’organiser et de s’exprimer, liberté toujours menacée par les réactionnaires.

Affiche pour le 1er Mai 2011 en Egypte

Pour le 1er mai 2012, les mouvements Occupy de Los Angeles et de Long Beach ont lancé un appel à la grève générale (ce n’est pas un jour férié aux Etats-Unis), appel repris par des collectifs similaires de New York à San Francisco. S’il n’y a pas eu de grève générale, le 1er mai 2012 a été, comme les années précédente, ce jour où « des millions de gens à travers le monde marcheront, dans des dizaines de différentes langues, mais partageront la même revendication, la défense des intérêts de la classe ouvrière » comme le disait l’appel pour le 1er Mai 2012 en Israël.

1er Mai 2012 à Sydney (Australie)

1er Mai 2012 à Chicago

Et pour ce 1er Mai 2013, nous sommes redescendus dans les rues, aux quatres coins du monde, pour défendre nos intérêts… car pour finir avec les mots de Rosa Luxemburg : « Aussi longtemps que la lutte des travailleurs contre la bourgeoisie et les classes dominantes continuera, aussi longtemps que toutes les revendications ne seront pas satisfaites, le 1° mai sera l’expression annuelle de ces revendications. Et, quand des jours meilleurs se lèveront, quand la classe ouvrière du monde aura gagné sa délivrance, alors aussi l’humanité fêtera probablement le 1° mai, en l’honneur des luttes acharnées et des nombreuses souffrances du passé. »

Transmis par la_peniche



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