Le lourd bilan écologique du groupe minier Vale

vendredi 1er juin 2012
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A quelques semaines de Rio + 20, le sommet mondial sur le développement durable, un collectif d’ONG dénonce les pratiques du brésilien Vale, deuxième plus grand groupe minier au monde.

La société minière Vale se trouve de nouveau sous les projecteurs. Un rapport, « Le non-développement durable de Vale 2012 », rendu public le 18 avril à Rio, porte des accusations pour le moins sévères contre l’entreprise brésilienne privatisée en 1997. Selon l’organisation Articulation internationale des victimes de Vale (AIVV), qui regroupe 30 mouvements sociaux au Brésil, en Argentine, au Canada, au Chili et au Mozambique, Vale aurait causé en 2010 des dégâts sur l’équivalent d’une superficie de 741,8 km².

La société est accusée d’avoir émis, la même année, 89 millions de tonnes de dioxyde de carbone et 6 600 tonnes de particules en suspension, soit 29 % de plus par rapport à 2009. L’émission de dioxyde d’azote a été de 110 000 tonnes en 2010, soit 30 % d’augmentation en un an. Et celle du dioxyde de soufre a atteint les 403 000 tonnes, 25 % de plus qu’en 2009. Ce sont des chiffres officiels figurant en bonne place dans le rapport sur le développement durable 2010 de Vale.

Selon Andressa Caldas, responsable de l’ONG Justiça Global, le rapport de l’AIVV répond point par point au rapport de Vale, qui est présente dans le secteur des mines, de l’énergie et de la logistique : « Vale viole les droits humains non seulement au Brésil, mais aussi dans les 37 pays où elle intervient [...]. Au Canada, la tentative de Vale de changer radicalement sa relation avec les travailleurs et les syndicats a provoqué les grèves les plus longues de l’histoire du pays », souligne Andressa Caldas. Elles ont duré onze mois, entre 2009 et 2010, à Sudbury et Port Colborne, dans la province de l’Ontario, au sud-est du pays, et dix-huit mois à Voisey’s Bay, dans la province orientale de Terre-Neuve-et-Labrador.

« La crise mondiale actuelle a été utilisée comme justification pour réduire les salaires, augmenter les journées de travail, licencier en masse, supprimer des acquis sociaux », dénonce le rapport de l’AIVV. En 2012, quatre travailleurs sont morts dans des exploitations minières canadiennes de Vale. La direction de Vale, à Sudbury, a suspendu, le 30 janvier, l’activité de cinq mines après la mort de deux travailleurs ensevelis par un torrent de boue dû à une infiltration d’eau ayant inondé le tunnel où ils opéraient.

L’enquête réalisée par le syndicat United Steelworkers a conclu que Vale avait délibérément ignoré les problèmes d’infiltration, alors que cette zone aurait dû être isolée. « Malheureusement, des travailleurs sont morts. La compagnie était consciente que les conditions de sécurité n’étaient pas suffisantes, mais n’a rien fait pour y remédier. Nous faisons pression sur le gouvernement canadien pour qu’il admette la responsabilité pénale de Vale dans ces accidents », a expliqué le dirigeant du syndicat Myles Sullivan, à Rio.

Le rapport de l’AIVV brocarde par ailleurs l’entreprise brésilienne sur le non-respect des normes environnementales. A Rio, la ThyssenKrupp Companhia Siderúrgica do Atlântico (TKCSA), fruit d’un regroupement entre Vale et ThyssenKrupp Steel, le plus grand producteur d’acier d’Allemagne, possède une usine. A proximité de celle-ci, la population a subi une augmentation de 600 % des particules fines de fer dans l’air [Vale est le premier producteur mondial de ce minerai], selon des chiffres émanant du procureur de la République de l’Etat de Rio, qui avait déjà poursuivi l’entreprise et deux de ses dirigeants pour des faits similaires.

Vale visée par plusieurs mouvements

_ Les quatre premiers mois de l’année ont vu Vale devenir la cible de protestations dans l’Etat du Maranhão au Brésil, au Mozambique, à Sudbury (au Canada), à Morowali (en Indonésie) ou encore à La Loma (en Colombie). Dans l’Etat du Pará, où Vale est membre du consortium qui construit le mégaprojet controversé du barrage de Belo Monte, des manifestants ont occupé les chantiers de la rivière Xingú pour protester contre le déplacement des Amérindiens et les dégâts environnementaux que cela implique.

_ Les organisateurs du Public Eye Award 2011, en présence du Prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz, ont décerné le prix du public à l’entreprise Vale « dont la participation au projet du barrage de Belo Monte n’est que le dernier chapitre d’une histoire continuellement marquée par un comportement particulièrement irresponsable », soulignent les ONG. « La réalisation de ce projet va forcer près de 40 000 personnes à quitter l’endroit où ils vivaient, sans avoir été consultées et sans espoir de recevoir la moindre compensation. Dans la région, 80% des fleuves seront détournés pour le barrage, inondant une surface équivalente à celle du Lac de Constance ». D’une puissance prévue de 11 200 mégawatts, Belo Monte constitue un des piliers du développement énergétique du Brésil, qu’il doit alimenter à hauteur de 10%.

Vale est signataire du Pacte mondial de l’ONU [1], membre du Conseil international des mines et métaux (ICMM) et de l’Indice de développement durable des entreprises de la bourse de São Paulo, qui établissent des principes de responsabilité sociale et environnementale. Pourtant, Vale a été élue « pire entreprise du monde 2011 » par The Public Eye Awards, une distinction attribuée chaque année en marge du Forum de Davos par Greenpeace et l’ONG Déclaration de Berne visant à sanctionner les entreprises pour leurs pratiques sociales et écologiques irresponsables. Vale l’a emporté devant la société électrique japonaise Tepco, l’opérateur des centrales nucléaires de Fukushima.

L’AIVV va envoyer leur rapport aux organisations internationales de contrôle, telles que l’ICMM ou le Global Reporting Initiative, afin qu’elles fassent pression sur l’entreprise pour qu’elle modifie sa conduite. En 2010, Vale a réalisé un résultat opérationnel de 21,7 milliards de dollars [2], et, en 2011, de 22,2 milliards [3]. Vale a réagi par un communiqué précisant que la société était sensible « à toutes les suggestions et critiques visant à améliorer ses activités. Nous avons conscience que l’activité minière peut avoir des incidences fâcheuses pour les gens. C’est pour cette raison que nous travaillons en association avec les communautés locales et les gouvernements pour trouver des solutions garantissant aux personnes une meilleure sécurité. »

Le groupe minier a admis l’existence de victimes au Canada. Il précise néanmoins avoir adopté de nouvelles mesures plus rigoureuses pour éviter la répétition de telles situations. Dans son dernier rapport, Vale admet qu’en 2010 il y a eu 11 accidents mortels. Il assure que son objectif est, désormais, de « zéro mort ».

Par Fabíola Ortiz source ADITAL le 24/05/2012

Transmis par Linsay


[1une charte de bonne conduite destinée à promouvoir les pratiques éthiques dans les entreprises

[216,6 milliards d’euros

[317 milliards d’euros



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