12 ans avec du plomb dans les murs

dimanche 13 février 2011
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La Marseillaise du 7 février a publié, sous la plume de Myriam Guillaume, un important dossier sur le saturnisme lié à l’habitat insalubre, que nous reproduisons ici en deux articles. La gravité du sujet le mérite bien...

Des pots, des paniers et des arrosoirs suspendus aux persiennes et aux cordes à linges dégoulinent de plantes vertes. Elle a belle allure la rue de l’Arc depuis que Kamar Idir, qui anime au sein d’Artriballes des ateliers avec la population du quartier, y a impulsé le goût du jardinage. Mais derrière les murs des vieilles façades marseillaises, le mal-logement continue à frapper. Au numéro 13, Mamadi et Nyma C. élèvent depuis 8 ans leurs 4 enfants au milieu du plomb.

Dans le 18 mètres carrés que Mamadi et Nyma louent 290 euros depuis 1999, Mohamed, 7 ans, lit sur le tapis, tandis qu’Aboubakar, 6 ans, et sa sœur Fatoumata, 8 ans, se chamaillent pour un jouet. Quant à Omar, 2 ans et demi, il dort sur « le lit des garçons », coincé dans l’alcôve de la pièce. Nyma est assise sur un canapé, ses mains soutiennent son ventre. « Le bébé doit arriver dans quelques jours, précise Mamadi. Angoissé, il ajoute : je ne veux plus que mes enfants vivent dans ces murs ».

A Noailles, cible de 15 ans de lutte contre l’habitat indigne, ce père de famille, intérimaire dans le BTP, crie à l’urgence, sans savoir par où commencer. « Ce matin encore, les pompiers, la police et l’EDF sont passés. Le compteur électrique est tombé sur le cumulus. Il y a eu des flammes. J’ai immédiatement éteint. Ils ont coupé l’électricité par précaution ». Le convecteur hors d’usage, un chauffage au fuel est allumé. Et la fenêtre entrouverte « pour l’odeur ». Des murs aux plâtres éventrés, des sols troués, un plafond menaçant, des installations sommaires, une fenêtre unique, une salle d’eau en cagibi non ventilée…L’état des lieux du studio ne laisse aucun doute : insalubre et indigne.

Et si on gratte un peu : voilà 12 ans que ce couple vit dans des murs toxiques. Pire, « l’imprégnation au plomb est avérée pour deux des enfants », explique Dominique Idir, artiste engagée d’Artriballes qui veut faire avancer le dossier. Et de lister : « L’immeuble est répertorié dans la cartographie du saturnisme édifiée par la Ddass. Un constat sur les risques d’exposition au plomb a été remis à leurs services [1] en octobre 2009 ».

Elle s’étonne : « Tout le monde est prévenu, rien ne bouge ».Un arrêté de péril est pris sur l’immeuble en juillet 2010, avec une injonction à travaux sous huit mois. A deux mois de l’échéance, le chantier semble bien mal engagé. « Tant qu’on n’atteint pas le péril imminent, on n’avance pas sur la question du relogement », déplore encore Corinne Adrian, éducatrice de l’association Afor logement.

Françoise Gaunet-Escarasse, adjointe au maire déléguée à la Santé, réagit : « nous sommes en train de faire une déclaration d’insalubrité remédiable. C’est la préfecture qui sanctionnera ». Quant à l’agence qui gère l’immeuble de cet unique propriétaire ? La Compagnie européenne de participations immobilières, une SCI du Cours Puget, à la direction difficile à joindre…

Myriam Guillaume


En médaillon, une image fréquente d’une cage d’escalier dans le quartier Noailles au centre de Marseille


[1aujourd’hui Agence Régionale pour la Santé, ndlr



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