Aux Canaries, les clandestins ne font que passer.

vendredi 23 juin 2006
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Au îles Canaries, les gros navires font peur.

Car l’un des grands fantasmes des îliens est de voir arriver une vague de bateaux avec 500 ou 600 personnes à leur bord cherchant à accoster sur la plage.

Jusqu’à présent, l’essentiel du trafic s’est fait sur des petites embarcations, de 40 à 60 passagers chacune, dans lesquelles les immigrants risquent leur vie.

En 2002, année record, 10 000 personnes ont ainsi débarqué aux Canaries à bord de ces barcasses. En 2003,elles étaient 9 500, 8 500 en 2004, et 4 700 l’an dernier.

« Cette diminution s’explique par l’excellente collaboration avec les forces de police marocaines », souligne le préfet des Canaries, José Segura.

Mais les spécialistes ne se font aucune illusion, ils savent que des milliers d’êtres humains attendent pour embarquer là où ils pourront : des travailleurs, des réfugiés, des déplacés fuyant les crises d’Afrique de l’Ouest.

L’accès aux anciens pays colonisateurs (France, Royaume-Uni) étant de plus en plus difficiles, les Canaries sont devenues le territoire sous juridiction européenne le plus proche des côtes africaines.

Les premiers mois de 2006 ont été marqués par une reprise de l’immigration par voie maritime (plus de 7 000 personnes en provenance d’Afrique sont déjà arrivées depuis le début de l’année).

Une recrudescence qui avive les contradictions dans lesquelles se débattent les forces vives de l’archipel.

Les nationalistes, qui gouvernent seuls la communauté autonome des îles Canaries, maintiennent une statégie agressive.

Ils veulent que l’Etat imperméabilise les frontières et leur permette de contrôler plus strictement le séjour des étrangers non-ressortissants de l’Union européenne qui résident déjà sur l’archipel. Car si les arrivées massives de réfugiés subsahariens par voie de mer sont très médiatisées, ceux qui arrivent tout simplement par avion représentent la source principale d’immigration illégale.

362 000 HABITANTS SUUPPLEMENTAIRES EN DIX ANS.

Pour Paulino Rivero, président de la Coalition canarienne, le principal parti de l’archipel, le caractère spectaculaire de la tragédie en mer occulte l’« immigration invisible ».

Car, entre 19 000 et 20 000 citoyens extérieurs à l’Union européenne s’établissent chaque année sur les îles. Dans la plupart des cas, ils « oublient » tout bonnement de repartir à l’expiration de leur visa touristique.

Qui sont-ils ?

Essentiellement des Latinos-Américains, des Maghrébins et des Européens non communautaires.

Cette situation est strictement comparable à celle qui prévaut dans d’autres régions d’Espagne (notamment Madrid, la Catalogne et la Murcie), mais, dans l’archipel, on veut croire que l’insularité crée des conditions particulières.

« Nous ne sommes ni n’avons jamais été un peuple xénophobe, au contraire, nous sommes accueillants », assure José Miguel Ruano, 44 ans, conseiller de la présidence de la communauté des Canaries. « Mais notre capacité d’accueil est limitée. Notre territoire, c’est 7 500 kilomètres carrés, dont 40% d’espace protégé. La population des Canaries avoisine les 2 millions. Or l’archipel enregistre plus de 50 000 nouveaux résidents par an. Si l’on y ajoute les 12 millions de touristes annuels, il est facile de comprendre que nous ne pouvons pas continuer sur cette lancée ».

Début 2005, les Canaries comptaient officiellement 222 000 résidents étrangers, c’est à dire 11,3% de la population.

Un chiffre effectivement supérieur à la proportion d« étrangers » en Espagne.

Deux millions d’habitants, est-ce peu ou beaucoup ? « Si l’Espagne avait la même densité de population que la nôtre, il y aurait actuellement 130 millions d’habitants dans la péninsule », explique Alvaro Davil, directeur de l’Institut canarien des statistiques.

Entre 1996 et 2005, la population de l’archipel a gagné 362 000 habitants « comme s’il s’était créé une nouvelle ville de la taille de »Las Palmas", la capitale régionale.

La clémence du climat des îles de l’Atlantique n’attire pas uniquement des retraités fortunés : « Parmi les étrangers non communautaires, les proportions d’hommes et celle des personnes en âge de travailler sont nettement supérieures à leur représentation parmi le reste de la population », indique le responsable des statistiques des Canaries.

Ce qui signifie que les gens viennent surtout pour chercher du travail.

Les statisticiens locaux ont calculé que, en dix ans, l’archipel a créé 258 000 postes. Un chiffre très supérieur à l’accroissement naturel de la population active.

En clair, l’archipel a besoin de bras pour son développement.

LES SUBSAHARIENS SONT TRANSFERES OU EXPULSES

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, cette situation ne concerne que de très loin les Subsahariens.

Les immigrés qui arrivent dans des canots de fortune sont repêchés- ou parfois simplement interceptés- par les services de l’Etat et pris en charge dès leur arrivée par les dispositifs d’urgence.

Mis à part quelques cas d’évasion, l’impact direct de cette immigration illégale sur l’augmentation de la population résidante de l’archipel est nul.

Car les clandestins sont transférés dans des centres de détention d’où ils n’ont pas le droit de sortir pendant quarante jours, délai légal au cours duquel ils doivent être remis à leur pays d’origine ou transférés vers d’autres régions espagnoles.

En arrivant sur la péninsule, ils sont répartis dans des centre d’accueil,qu’ils sont autorisés à quitter lorsque les démarches d’expulsion n’aboutissent pas.

Article de : Joaquin Pietro trouvé dans « Le Courrier International »par Linsay



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