La Hongrie, c’est fini

jeudi 30 septembre 2010
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Le miracle attendu de l’effondrement des pays de l’Est se traduit par de bien piètres résultats et l’UE n’arrange pas les choses nous dit l’éditorialiste.
Décidément le capitalisme, à la sauce social-démocrate ou droitière, n’est pas la terre promise et les hongrois en font l’amère expérience...
Pas étonnant dans ces conditions que 62% des Hongrois jugeaient en 2008 que l’ère Kadar (1957-1989) a constitué l’époque la plus heureuse de leur pays. Ils n’étaient que 53% dans le même sondage en 2001. Des chiffres qui constituent en encouragement certain pour le parti communiste hongrois qui lutte dans des conditions difficiles dans un pays où au nom de la démocratie on voudrait rayer de la carte toute référence possible à l’idéologie marxiste et où les « socialistes » à la mode Strauss-Kahn viennent de perdre les élections d’avril 2010 au profit d’une droite fascisante.

La majorité des jeunes Hongrois ne voit pas leur avenir assuré dans leur pays. Telle est la conclusion, évidente pour tous, d’une récente enquête scientifique réalisée par des chercheurs de l’Académie hongroise. Aujourd’hui, les jeunes ne se contentent pas de rêver de vivre ailleurs, dès qu’ils ont des diplômes en poche, ils font des projets concrets pour s’expatrier.

Seuls 39% des lycéens considèrent que l’amour de la patrie implique de rester au pays. Si un tiers d’entre eux hésite, un autre tiers a déjà décidé de partir. La situation est toutefois moins dramatique chez les étudiants : ils ne seraient que 19 % à prendre le large. Nous devons par conséquent nous réjouir que 61 % des jeunes en facs pensent que leur avenir est en Hongrie.

Qui pourrait retenir un million de chômeurs ?

L’autre jour, au Parlement, un député chrétien-démocrate s’est lamenté de la baisse de la population hongroise. On ne compterait même plus 10 millions de Magyars. Il faut encourager les jeunes à faire des enfants, a-t-il déclaré. Mais la plupart de nos enfants nés et élevés ici, qui sont devenus bacheliers voire diplômés, ne trouvent pas leur place dans cette société.

Mon fils aîné m’a ainsi dit que s’il n’était pas entouré d’une famille aussi grande et aussi affectueuse que la nôtre, il ne resterait pas en Hongrie. D’après lui, les enfants des familles décomposées partent plus facilement que ceux des familles unies. Il pense également que, muni d’un bon diplôme universitaire, il est impensable de ne pas trouver un travail qui permette de fonder une famille dans les pays à l’ouest de l’Europe. Et que chez nous, ce n’est pas le cas.

Les chercheurs, eux aussi, partent travailler à l’étranger, nous a expliqué le président de l’Académie des sciences de Hongrie, József Pálinkás. Médecins, infirmières, menuisiers, maçons, tourneurs ou mécaniciens, par milliers, se sont rendus à l’évidence : il y a un antagonisme entre le salaire médiocre qu’ils touchent ici et la compétitivité de la Hongrie.
Le nouveau gouvernement [1] a promis la création d’un million d’emplois. Mais qui pourrait retenir un million de chômeurs ?

Des milliers de familles ont été expulsées de leur logement : ayant perdu leurs emplois, elles ne pouvaient pas rembourser leurs crédits chaque mois en forints. D’après György Matolcsy, ministre des Finances, environ 300.000 familles risquent ne pas pouvoir rembourser les dettes qu’elles ont contractées en devises étrangères. Et si les cours poursuivent leur hausse, ces foyers risquent de perdre à leur tour leurs propriétés. Dans ce cas, qui pourrait les dissuader, eux et leurs enfants, de refaire leur vie ailleurs, dans un pays disposant de véritables cadres juridiques ?

L’UE tolère que des foules travaillent pour un salaire misérable

En un mot comme en cent : quand les jeunes prêts à fonder une famille estiment qu’ils n’ont aucun espoir d’assurer leur existence sur le sol de leurs ancêtres et qu’ils sont contraints de quitter leur patrie, alors c’en est fini du pays qui assiste à cela les bras croisés.

L’UE, dont l’attention se limite à fixer la courbe des concombres autorisés à la vente et à interdire les expériences scientifiques sur des primates, mais tolère que, dans ce pays branché sur la pompe aux taux d’intérêt, des foules travaillent comme des forçats pour un salaire ne couvrant même pas les besoins les plus élémentaires, ne vaut pas tripette.

L’élite politique de Bruxelles comme de Budapest peut être fière qu’en l’espace de vingt ans, en plus de la privatisation, de la libéralisation, de la suppression des taxes douanières prohibitives, de la dévaluation continuellement retardée de l’euro, de la corruption à tous les étages, des magouilles appelées « marchés publics » et des charges incitant à tricher aux impôts, nous nous retrouvions à exporter aux Etats de l’UE des tensions salariales et sociales plutôt que des produits hongrois compétitifs et bon marché.

Le nouveau gouvernement qui essaie de se dépêtrer du terrible héritage des socialistes, affirme que bientôt ça vaudra la peine de rester en Hongrie, de rentrer en Hongrie. L’ère de Gyurcsány [2] qui avait dit « Vous êtes libres de partir ! » est finie. Nous espérons fort qu’il n’est pas déjà trop tard.

Par Matild Torkos dans Magyar Nemzet Budapest le 28/09/2010

Transmis par Linsay


[1du Premier ministre Viktor Orban, président de la Fidesz

[2Premier ministre de 2004 à 2009



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