L’avenir radieux

mardi 20 juillet 2010
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Cet article, envoyé par le KKE [1], dépasse largement le cadre de la Grèce et des autres pays cités. Il éclaire sur la stratégie des dirigeants de l’UE qui se confirme et s’amplifie année après année, quelques soient les gouvernements en place. Par la richesse de son argumentation, par les chiffres donnés, il a sa place dans cette rubrique REPERES.

A l’époque de l’adoption du traité de Maastricht, la plupart des Partis politiques Grecs de la Droite jusqu’à y compris une certaine Gauche, criaient victoire et prévoyaient un avenir radieux pour l’Union Européenne (UE).

Ils récidivaient avec Nice, Bologne, Lisbonne et la « Constitution » Européenne, se déclarant convaincus que l’UE allait évoluer vers une apothéose de démocratie et de bien-être pour ses Peuples. Pour ce qui concerne l’union monétaire, la « zone euro » serait une oasis feutrée et ses Membres seraient éternellement à l’abri des crises économiques. Marx, Engels et leurs théories tordues et vieillottes pourraient passer définitivement aux oubliettes ; désormais, tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Soit.

Voici ce que l’on constate quelque temps après :
- Le « miracle » Irlandais a été démythifié. Le Scandinave aussi d’ailleurs…
- La Grèce est au bord de la faillite
- Le Portugal suit la route Grecque ; il est déjà « dégradé » par la Standard & Poors
- L’Espagne compte 20% de chômeurs ; elle est aussi « dégradée » par la Standard & Poors
- Le chômage est en hausse partout
- Tous les Gouvernements de l’UE mettent en place (de concert, Libéraux et Socialistes confondus…) des mesures comprenant augmentation substantielle de l’âge de départ à la retraite, gel ou diminution nette des salaires et des retraites, diminution des dépenses publiques (spécialement celles relatives à l’Education et à la Santé), « libéralisation » des licenciements, dégradation des relations de travail, privatisations, baisse des impôts sur les profits, hausse des impôts indirects
- Le « mécanisme de sauvetage » ou « mécanisme de soutien », c.à.d. la « troïka »
composée de la Commission Européenne (CE), de la Banque Centrale Européenne
(BCE) et du Fonds Monétaire International (FMI), est déjà installé et actif en
Hongrie, en Lettonie et en Roumanie (tous trois Pays de l’UE) avec des résultats bien palpables qui se résument ainsi :

Pays Somme prêtée (milliards d’euros) Mesures prisesConséquences
Hongrie 20 - Gel des salaires pour 2 ans
- Disparition du 13e mois
- Disparition du 13e mois de
Retraite
-  Age de départ à la retraite
augmenté de 3 ans
- TVA à 18% pour les articles
de première nécessité et
augmentation à 25% du taux
de 20% pour tout autre article
- Diminution de 10% des
allocations maladie et des
pensions d’invalidité
- 6% de hausse du prix des
carburants, du tabac et de
l’alcool
- 11% de chômage (taux
officiel…)
- Chute de 17% de la
production industrielle et
agricole
- Chute de 5% des ventes au
détail
- Triplement du pourcentage
de la population vivant en
dessous du seuil de
pauvreté
- Moyenne des pensions de
retraite à 230 euros
- Chute de l’espérance de vie
de la population ; la
Hongrie se place désormais
à la 80e place dans le monde pour cet indicateur.
Elle est la dernière parmi
les membres de l’UE pour
« le nombre d’années en
bonne santé après l’âge de
50 ans »

- Annulation des subventions
aux collectivités locales
- Triplement de l’échelle
d’imposition des personnes
physiques
- Diminution de 5% des
cotisations patronales au
régime des retraites des
salariés
- 12.000 licenciements dans les
collectivités locales
Pays Somme prêtée (milliards d’euros) Mesures prises Conséquences
Lettonie 11 - Diminution de 10% des
retraites
- Moyenne des pensions de
retraite à 245 euros
- Fermeture de 10% des
Etablissements du
Secondaire
- Diminution jusqu’à 40% des
salaires des Enseignants et
du Personnel Hospitalier
- Licenciement de milliers de
Fonctionnaires et
diminution de 20% du
salaire de ceux qui n’ont pas
été licenciés
- Jusqu’à 50% de diminution
des dépenses publiques pour
la Santé
- Abaissement du revenu
exonéré d’impôts pour les
Salariés
- TVA à 18% pour les articles
qui ne sont pas de luxe
- Salaires diminués de 31%
en moyenne ; dans certains
cas la diminution a atteint
46%
- Taux de chômage à 22,5% ;
il a augmenté de plus de 7
unités en l’espace d’une
année
- Plus de 26% de la
population vit en dessous
du seuil de pauvreté
- 51% des retraités ne
peuvent pratiquement survivre
- Le PNB a chuté de 24%
- De 121 Hôpitaux en 2006,
le Pays n’en avait que 59 en
2009 et n’en possédera plus
que 24 en 2013
Pays Somme prêtée (milliards d’euros) Mesures prises Conséquences
Roumanie 20 - Gel des prêts bancaires
- Licenciement de 137.000
fonctionnaires
- Augmentation des taxes sur
l’alcool, le tabac et
l’immobilier
- Diminution importante des
subventions sociales et
services de l’Etat
- Baisse de 25% des salaires
dans le Public et de 15% des
pensions de retraite et
d’indemnisation chômage
- Le PNB a chuté de 7,1%
- Milliers de faillites et chute
généralisée du chiffre
d’affaires
- Environ 500.000
licenciements dans le
secteur privé
- Taux de chômage
(officiel…) à 9%
- Pauvreté enfantine à 33%
- Deux tiers de la population
déclarent « ne pas pouvoir
s’en sortir »
- 50% de la population ne
peut subvenir à ses besoins
essentiels dans un Pays où
le seuil de pauvreté a été
fixé à 158 euros mensuels

Ce même mécanisme à l’efficacité prouvée, a été appelé à « sauver » la Grèce, en lui prêtant environ 45 milliards d’euros dans un premier temps et de l’ordre de 70 milliards supplémentaires dans les deux années à venir (il s’agit bien sûr de prêt, avec un taux d’intérêt largement supérieur au taux interbancaire, c.à.d. d’un accroissement substantiel de l’endettement de l’Etat et en aucun cas d’aide gratuite). On peut imaginer l’enchaînement des mesures qui sont déjà ou seront par la suite prises et de leurs tragiques conséquences : emploi et conditions de travail, éducation et santé, salaires, retraites et niveau de vie, tout ce qui a été bâti par le Peuple avec peine ou arraché avec des luttes, va être démoli.

Pour ne pas s’étendre de façon démesurée en parlant des coupes claires dans les salaires, de la hausse de la TVA (le taux bas, récemment augmenté à 9% grimpe encore pour passer à 11% et celui de 19% passe à 23%...), de diminution des dépenses Publiques pour la Santé (et de la nette augmentation des dépenses des particuliers qui atteignent déjà 60% du total) et des dépenses Publiques pour l’Education, d’augmentation des impôts sur les personnes physiques et de la nième diminution du taux d’imposition des bénéfices des sociétés, on se contentera d’un seul exemple, relatif au régime général des retraites :

- avant le « sauvetage », départ à la retraite après 35 ans de travail avec 70% du salaire moyen des 5 « meilleures » années (années à plus hauts revenus salariaux)
- après le « sauvetage », départ à la retraite après 40 ans de travail avec 48% du salaire moyen calculé sur toute la vie active (!)

Trois remarques :

- En Grèce, le salaire qui est pris en compte pour le calcul de la retraite est différent du salaire que touche un Salarié pendant qu’il est actif. Pour simplifier, ce dernier est
formé d’un salaire de base qui augmente avec l’ancienneté et de primes, dans
un rapport approximatif 65% / 35%. Le « salaire » qui est pris en compte pour le
calcul de la retraite est seulement le salaire de base…

- Si les salariés commettent l’erreur de vivre plus longtemps qu’escompté, ils seront
pénalisés : il est prévu que l’âge de départ à la retraite sera repoussé de trois à quatre mois chaque fois que l’espérance de vie augmentera d’un an

- Vu l’évolution du Marché du Travail où précarité, emploi à temps partiel et chômage
deviennent la règle, les 40 années de cotisation exigées pour une retraite « pleine »
resteront de toute façon un rêve irréalisable pour l’écrasante majorité des salariés
Bref, dans le domaine des retraites aussi, c’est un carnage ! Le révérend Malthus prend sa revanche…

Et dans le passé ? Comment ce peuple qui est appelé aujourd’hui à se saigner à blanc a-t-il vécu ?

Voici ce qui s’est passé ces 10 dernières années : ceux qui produisent la richesse du Pays, c.à.d. ceux qui travaillent, ont déboursé environ 500 milliards d’euros pour servir la dette contractée par les Gouvernements issus des mêmes Partis politiques (Droite et Socialiste) qui alternent au pouvoir depuis la chute de la dictature des Colonels en été 1974 : 340 milliards ont été déboursés pour couvrir intérêts et amortissement des obligations qui avaient été émises pour des durées de 5 et de 10 ans et qui sont venues à échéance durant cette décennie, auxquels il faut ajouter les sommes déboursées pour servir des emprunts à plus court terme (6 mois ou 1 an) qui ont été contractés.

5.000.000 de travailleurs avec un salaire moyen de – disons - 1.500 euros par mois (optimiste puisque 50% des salariés touchent moins de 1090 euros), ont déboursé 50 milliards par an pendant les dix dernières années. En moyenne, chacun a gagné 21.000 euros par an (14 mois par an et on compte large…) et déboursé 10.000 pour la dette ; une année sur deux il a donc travaillé pour les Prêteurs. Sur dix ans de travail, cinq ans pour les Banquiers et autres Rentiers !

Et cette même personne doit maintenant se serrer encore plus la ceinture ! Le travailleur actif mais aussi le Retraité, ce dernier touchant d’ailleurs en moyenne la pension mirifique de 650 euros par mois !

Il faut être clair. Les Banques (Grecques, Françaises, Allemandes, Américaines,..) ainsi que les autres Investisseurs (Grecs et Internationaux) qui détiennent des créances Grecques ou des créances d’autres Pays (y compris de Pays « forts » comme la France, l’Allemagne ou le Royaume-Uni), ne sont pas des Hors-la-loi.

Leur fonctionnement est parfaitement légal.
Elles fonctionnent en parfaite symbiose avec le système économique et politique dans lequel elles évoluent, système qui les a engendrées et qu’elles ont d’ailleurs contribué à façonner et à consolider, par l’intermédiaire notamment de Maastricht et autres Traités, Accords et Lois du même type.

Pour ce qui concerne la Grèce, Pays d’environ 11 millions d’habitants avec un PNB de l’ordre de 237 milliards d’euros, le système de ces accords, traités et lois a forgé un cadre économique dont voici quelques traits caractéristiques :

- En l’espace de 12 ans, le PNB Grec a crû de 60% alors que le niveau de vie des
Travailleurs a stagné (ceci avant les mesures récentes ; après l’accord avec la
« troïka », il est prévu une chute libre de leur niveau de vie)

- 30.000 familles Grecques détiennent 50 milliards d’euros, déposés au « private
banking » des Banques (il ne s’agit certainement pas d’ouvriers, de fonctionnaires,
de petits commerçants ou de petits agriculteurs…). 40 milliards supplémentaires
sont détenus par des grecs vivant à l’Etranger

- Les profits des sociétés cotées à la Bourse des valeurs d’Athènes ont été de 11,3
milliards en 2007, de 10 milliards en 2008 et de 11,8 milliards en 2009, année
pendant laquelle le Pays a été frappé de plein fouet par la crise

- A elle seule une banque grecque a réalisé 6,3 milliards d’euros de bénéfices pendant les cinq dernières années

- Des sociétés grecques ont investi (avec l’aide de l’Etat…) pour plus de 20 milliards
d’euros à l’Etranger ; plus de 16 milliards d’euros ont été dirigés vers des Pays
Balkaniques, essentiellement la Bulgarie et les quasi-protectorats créés par les
bombardements des Alliés UE/OTAN et la dislocation de la Yougoslavie qui s’en est
suivie ; il fait bon d’investir dans ces contrées, les salaires y sont très bas…

- Pendant la période 2004-2008 (Gouvernement de Droite), 3,5 milliards d’euros ont
été gracieusement « offerts » aux entreprises au titre d’impôts dus mais jamais encaissés par l’Etat ; en même temps, le taux d’imposition des bénéfices des sociétés a chuté de 35% à 25% ; perte pour le budget de l’Etat : environ 5,5 milliards d’euros (pendant la période d’avant 2004, Gouvernement socialiste, ce même taux avait chuté de 45% à 35%). Une nouvelle diminution, de 25% à 20% est attendue incessamment (Gouvernement socialiste à nouveau…)

- Des études estiment à environ 10.000 le nombre des sociétés « off-shore » d’intérêts grecs et à 500 milliards d’euros leur chiffre d’affaires annuel global ; ces sociétés échappent bien-évidemment à l’impôt ; leurs propriétaires ne sont certainement pas des ouvriers, des fonctionnaires, des petits commerçants ou des petits agriculteurs

- Une partie (entre 6 et 6,5 milliards d’euros) des sommes qui sont annuellement
encaissées par les Sociétés au titre de la TVA, n’est jamais restituée à l’Etat (qui ne la réclame d’ailleurs pas …)

- Environ 5.000 sociétés doivent approximativement 31 milliards d’euros à l’Etat à des titres divers

- Les cotisations patronales dues (et jamais versées…) à la caisse de retraite des
salariés, atteignent 6,5 milliards d’euros. L’Etat lui-même doit à la caisse des sommes considérables, s’élevant au bas mot à 10,5 milliards d’euros.

- Des fonds très importants, appartenant aux caisses de retraite, ont été carrément
pillées (légalement…) au fil des ans. Par exemple, il fut un temps où les surplus des
caisses étaient obligatoirement déposés sans intérêt à la Banque Centrale pour « aider au développement du Pays », en fait pour subventionner les grosses entreprises. Au contraire, chaque fois que les caisses avaient besoin de liquidités, elles étaient obligatoirement dirigées vers le Marché libre, où elles empruntaient au taux fort. Il faut noter que les conseils de direction des caisses sont chaque fois nommés par le Gouvernement en place.

Depuis quelques années, d’un commun accord les Partis de Droite et Socialiste ont légiféré pour « permettre » aux directions des caisses de jouer leurs réserves de liquidité à la Bourse, avec des résultats catastrophiques (pour les caisses bien-sûr…). Ils les ont même forcées à acheter des obligations « toxiques », c.à.d. à haut risque, avec bien-sûr pour résultat des grosses pertes. Depuis les années 1950, les avoirs des caisses ainsi pillés se chiffrent à plus de 50 milliards d’euros,
sans compter les intérêts ! Si seulement une partie en était restituée, le fameux
« trou » du système disparaitrait et les Salariés Grecs auraient sans aucun problème
pu jouir de retraites substantielles, leur assurant un niveau de vie convenable. Au lieu
de ceci, on rogne les retraites de 600 euros sous prétexte de « rendre le système
viable » !..

- Le taux d’inflation annuelle, de 1% en Avril 2009 est passé à 4,8% en Avril
2010. Ceci est dû à la hausse des impôts indirects (TVA et taxes spéciales sur
carburants, alcool et tabac), la hausse des péages des autoroutes privatisées, des
transports en général etc. L’impact du plan de « sauvetage » n’y est pas encore intégré

- Les armateurs grecs, c.à.d. les quelques familles qui possèdent 20% de la flotte marchande mondiale (soit 40,9% de la flotte marchande de l’UE) ont acheté en 2009 (année de crise…) des navires d’occasion pour plus de 3,16 milliards d’euros ; ils en ont aussi commandé de neufs pour plus de 30 milliards d’euros. En même temps, la majorité des marins grecs est au chômage ou a dû changer de métier. Des équipages originaires des Philippines, d’Indonésie et autres lieux exotiques sont enrôlés à la place, coûtant trois fois rien et travaillant sans convention collective et sans droits syndicaux, aux galères des temps modernes.

- L’appareil productif du Pays a été en grande partie démantelé. D’importantes branches telles les chantiers navals ont été privatisées et conduites au marasme.
L’électricité, les autoroutes, les télécommunications, les raffineries, les Banques, le transport aérien national ont été privatisés ; suivent la Poste, le Chemin de Fer et la distribution d’eau potable dans les grandes agglomérations. La Grèce, exportatrice de produits agricoles avant d’intégrer l’UE, en est maintenant largement déficitaire.

- A l’instar du gouvernement américain et des gouvernements d’autres pays de l’UE,
le gouvernement grec (au printemps 2009, gouvernement de droite) a mis à disposition des banques grecques 28 milliards d’euros (12% du PNB !) ; ensuite, ces mêmes Banques prêtent à l’Etat à des taux usuriers. 15 milliards supplémentaires sont mis à disposition des mêmes banques par le gouvernement (Printemps 2010, cette fois gouvernement socialiste) et encore 10 milliards, pris sur le prêt « consenti » par la troïka, vont constituer une « caisse de protection » du système bancaire !

- Pour créer des « nouveaux » postes de travail, il faut commencer par faire le vide ; on a donc, dans le cadre de ce même accord avec la troïka, libéralisé le régime des licenciements en augmentant le pourcentage de salariés qu’une entreprise peut mettre simultanément à la porte, tout en diminuant substantiellement la hauteur des indemnisations correspondantes

- On ne compte plus les milliards qui sont continûment et gracieusement offerts par le
Budget de l’Etat pour subventionner les investissements des entreprises et pour les
« aider » à embaucher (des jeunes à très bas salaire dont le contribuable paiera les
cotisations de Sécurité Sociale à la place des Patrons…)

Pour compléter la description du cadre grec, il faut noter que durant ces derniers mois, la propagande émanant de journaux, chaines de TV et de radio, du gouvernement, des partis politiques de droite, d’extrême droite et socialiste, de journalistes, de professeurs savants, d’analystes, a atteint une ampleur et une intensité jamais vues depuis des décennies ; ces dernières semaines elle a même atteint une sorte de paroxysme. Il s’agit de convaincre à tout prix le peuple que les mesures de « sauvetage » arrêtées sont une nécessité absolue, que leur acceptation est une question de vie ou de mort pour le Pays et qu’enfin, garder la tête baissée et l’échine pliée est un devoir patriotique ! Le Parti Communiste Grec qui s’y oppose, est presque ouvertement accusé de haute trahison…

Les mesures barbares sont officiellement imposées au Peuple Grec au nom de la « crise économique » et de « la nécessite d’en sortir au plus tôt ». Quelques remarques :

- Le « cas Grec » n’a rien d’exceptionnel : en 2009, dette publique 115,1% du PNB
(Italie 115,8%) et déficit budgétaire dont l’estimation par la Commission Européenne
a varié de 12% en Janvier 2010 jusqu’à 13,6% en Avril (Irlande 14,3%, Grande
Bretagne 12,3%, Espagne 11,2%) ; voici quelques autres indicateurs :

  • chiffres relatifs à la dette totale 2009 (c.à.d. ce qu’ont emprunté Etat, entreprises
    et particuliers), en % du PNB : moyenne de la zone euro 175, Grèce 179 mais
    Italie 194, Portugal 197, Espagne 207, Belgique 219, Irlande 222 et Pays Bas 234
  • données relatives à la dette extérieure totale (c.à.d. ce qu’ont emprunté Etat,
    entreprises et particuliers à des banques étrangères) en % du PNB : Espagne 80,
    Grèce 89,5 mais Portugal 130

- Le « pacte de sauvetage » ayant été conclu avec la troïka, un accroissement de la dette publique est attendu pendant les dix prochaines années suivant les estimations du FMI (149% du PNB est attendu en 2013) avant que celle-ci ne recule à 120% du PNB en 2020 ; le taux de chômage a officiellement dépassé 12% en Avril et risque d’atteindre 15% à la fin de cette année et jusqu’à 20% l’année prochaine (!)

- Le front de propagande attribue la crise aux agissements de quelques « mauvais gestionnaires », à un ministre « incompétent » ou même « corrompu » ou à quelques mauvais banquiers (de préférence des étrangers, pas des autochtones, les « nôtres » sont vertueux…) « avides de profits » ; « on » va même jusqu’à admettre qu’un gouvernement aurait pu être « incapable » (par le passé ; l’actuel est bien sûr parfait).

Au passage « on » n’hésite pas à sacrifier un bouc émissaire, même haut placé. Bref, « on » est disposé à faire toutes sortes de pirouettes, pourvu que le système qui écrase le prix du travail, favorise la production anarchique, déifie l’augmentation du profit et donc –inévitablement- engendre des crises, ne soit pas mis en cause !

- « On » évite soigneusement d’expliquer pourquoi ceux qui ont été obligés de se serrer la ceinture avant la crise pour « aider au développement économique du pays », « sortir l’économie du tunnel », « augmenter la productivité », « converger avec les
économies des autres pays de l’UE » « satisfaire aux critères d’admission à la zone
euro »
etc., doivent payer aussi pour « sortir de la crise », au déclenchement de
laquelle ils n’ont nullement contribué

Par l’intermédiaire de l’accord avec la troïka il s’effectue en fait un transfert de richesses massif, forcé et brutal du peuple vers l’oligarchie locale mais aussi internationale, directement ou après un passage par les caisses de l’Etat. Ce transfert est estimé à 45 milliards d’euros pour les 3 premières années (2010-2012) de présence de la troïka en Grèce.

Mis à part les transferts directs de fonds, le but principal du système mis en place par l’oligarchie (locale mais aussi internationale) et ses émanations diverses (troïka, gouvernement, partis de droite, d’extrême droite et socialiste), est de baisser considérablement le prix du travail et d’en modifier structurellement le marché (précarité, flexibilité, travail à temps partiel, facilité de licenciement, abaissement de l’indemnisation pour licenciement) dans l’optique d’un accroissement à outrance de la compétitivité. Les retraites doivent également être écrasées dans le double but d’alléger jusqu’à annulation les charges patronales et de réduire les fonds que le
Budget verse aux caisses de retraite et disposer ainsi de moyens supplémentaires pour « aider » de façon encore plus substantielle les entreprises.

Les mesures prises (qui ne sont pas du tout provisoires comme le front de propagande le prétend, au contraire, elles sont venues pour rester…) ressemblent beaucoup plus à la contribution grecque à la « stratégie Europe 2020 » qu’à un effort pour « sortir de la crise ». Cette politique n’est pas exclusivement grecque, loin s’en faut. Les mesures appliquées rappellent étrangement celles qui étaient préconisées par l’UE il y a plus de 10 ans lesquelles, pour des raisons diverses, n’avaient pu être mises en place à l’époque ; par exemple, la Directive Européenne 59/98 du 1er Septembre 1998 donnait déjà le ton pour légaliser les licenciements massifs. Les changements structurels du marché du travail étaient déjà demandés par Jacques Delors, demande réitérée par Jacques Santer, son successeur à la présidence de la commission européenne, lors de la réunion de Davos en 1995.

Pratiquement tout ce qui se passe aujourd’hui avait déjà été conçu dans l’optique de
Lisbonne pour « l’économie Européenne la plus compétitive en 2010 » [2] , longtemps avant que tout soupçon de crise n’apparaisse. Le but n’a pu être atteint à temps ; il a donc été réaffirmé avec pour horizon l’année 2020 et les différents Etats Européens, dans le cadre de l’« Europe 2020 ; une stratégie pour une croissance intelligente, durable et inclusive », prennent des mesures pour que chacun puisse mieux placer ses oligarques dans la course internationale (mais aussi intra-UE…) à la compétitivité.

Au nom de la « Stratégie Europe 2020 » ou de la « sortie de la crise », de la « résorption de la dette », de la « réduction du déficit », du « redressement économique », de la « défense de l’euro » et même de la « défense de la Patrie » -les prétextes ne manqueront
pas- tous les peuples d’Europe sans exception, se verront imposer des sacrifices sans fin.
Aucun secteur d’activité ne sera à l’abri, aucun acquis social ne sera épargné. En fait, il serait beaucoup plus franc et efficace d’adopter, au lieu de toutes ces mesures, une loi unique rétablissant l’esclavage ; le but « Europe, économie la plus compétitive en 2020 » n’en serait que plus facilement atteint.

Nicos Catsaros, Athènes, Mai 2010


N.B. : Les chiffres cités sont dans leur grande majorité tirés d’articles publiés ces derniers mois dans le quotidien Grec « Rizospastis ». Ceux relatifs à la dette publique apparaissent dans le communiqué de presse « euroindicateurs » no 55/2010 d’EUROSTAT du 22 Avril 2010.

Ceux relatifs à la dette totale et à la dette extérieure totale, ont été tirés d’un article de G. Delastic publié dans le quotidien Grec « Ethnos » du 11 Février 2010.


[1Parti communiste grec

[2Sur la stratégie de Lisbonne voir aussi article l’Europe, la gauche, le syndicalisme et Bokelstein NDR



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