EXPLOITATION ILLEGALE DES RESSOURCES NATURELLES DU SAHARA OCCIDENTAL

dimanche 23 avril 2006
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Comme tout Etat colonial, le Maroc ne se contente pas d’occuper illégalement le territoire du Sahara Occidental en réprimant ses habitants pour empêcher d’exprimer leur droit à l’autodétermination et leur aspiration à l’indépendance. Il accapare, tout aussi illégalement, ses richesses naturelles. La question des ressources ne constitue qu’un aspect particulier, mais important, du problème plus général du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et à décider de l’utilisation de leurs richesses.

Aucun droit souverain pour le Maroc

Dès 1963, le Sahara espagnol est inscrit par les Nations-Unies sur la liste des « Territoires non autonomes » auxquels est applicable le droit à l’autodétermination. Le 16 octobre 1975, la Cour internationale de Justice de la Haye précise qu’il n’y a aucun lien de souveraineté territoriale entre le Maroc et le Sahara Occidental. Les accords de Madrid de 1975 ne stipulent pas le transfert de la souveraineté sur cette ancienne colonie espagnole au Maroc, ils ne concernent qu’un « transfert de l’administration ».

Ne disposant d’aucune souveraineté sur le Sahara Occidental, le Maroc n’a donc pas le droit d’exploiter ses ressources. Cette interprétation est confirmée par le rapport du 21 janvier 2002 élaboré par le secrétaire général adjoint aux affaires juridiques des Nations-Unies, Hans Corell, qui confirme les principes du droit international ainsi que les règles consacrées des Nations-Unies recommandant la sauvegarde des ressources naturelles d’un territoire non autonome. Dans le cas présent, toute exploitation des richesses du Sahara Occidental est illégale sans l’assentiment du peuple sahraoui.

Des richesses qui suscitent des appétits

Le Sahara Occidental est désertique mais son sous-sol est riche en minerais. On y trouve du fer, du titane, du manganèse, de l’uranium et surtout du phosphate. La mine de Phosboucraâ constitue une des plus grandes réserves au monde avec de faibles coûts d’extraction. Elle a compté 3000 salariés dont la moitié de Sahraouis. Sous l’occupation marocaine, les travailleurs sahraouis ont été victimes de discriminations, leurs droits ont été diminués par rapport à ceux des salariés espagnols et marocains (durée du travail, salaires, congés, retraite, couverture médicale). Actuellement, les travailleurs sahraouis ne sont plus qu’une centaine et n’occupent plus de postes à responsabilité. Ils sont donc doublement spoliés : écartés de l’exploitation d’une richesse qui est propriété du peuple sahraoui et surexploités par rapport aux autres travailleurs.

Ces dernières années, le Maroc a signé des contrats de prospection pétrolière au Sahara Occidental avec des firmes multinationales avec la caution, pour ne pas dire la complicité, des gouvernements occidentaux. C’est ainsi que le PDG de TOTAL, M. Desmaret confirmait la signature du contrat de prospection en réponse à de nombreuses protestations :« Nous nous étions assurés, auprès du ministre français des Affaires étrangères et des Nations-Unies, que nous avions légalement le droit de signer cet accord avec les autorités marocaines ». Le 4 novembre 2005, l’entreprise pétrolière étasunienne Kerr Megee a prolongé jusqu’en 2006 son contrat avec le Maroc pour poursuivre ses études géologiques sur le potentiel pétrolier off shore du Sahara Occidental.

PECHE : UN ACCORD CAPITAL

Le Sahara Occidental possède les eaux parmi les plus poissonneuses du monde avec de nombreuses espèces très recherchées : crevettes, céphalopodes, thons, sardines, crustacés, etc....Cette richesse halieutique a suscité la convoitise des armateurs européens, notamment espagnols, qui ont cherché à acquérir des droits de pêche dans les eaux des pays tiers pour compenser la diminution des ressources halieutiques dans l’Union européenne. Des accords de pêche ont été signés par l’Union européenne avec de nombreux pays. L’accord UE-Maroc était le plus important avec des compensations financières d’un montant de 500 millions d’euros. En 1999, le Maroc a refusé le renouvellement de l’accord.

En 2005, les négociations entre le Maroc et l’Union européenne ont repris pour se conclure le 28 juillet avec la signature d’un nouvel accord. Profitant essentiellement aux bateaux espagnols et portugais, il est cinq fois moins important (avec 137 licences de pêche (au lieu de 629) et une compensation financière de 144 millions d’euros (au lieu de 500). Les eaux territoriales du Sahara Occidental sont incluses dans l’accord. Une nouvelle fois, l’Union européenne se contente de la formule « souveraineté ou juridiction du Maroc » sans délimitation géographique de la zone de pêche. L’Union européenne bafoue ainsi délibérément la légalité internationale.

Le Maroc se sert des compensations financières européennes pour acheter de nouveaux équipements militaires pour renforcer le mur de défense et réprimer le peuple sahraoui. Ces fonds européens tombent également dans la poche de nombreux profiteurs marocains, notamment des chefs militaires qui ont « investi » dans le secteur de la pêche (la presse marocaine a rapporté le trafic illégal de licences de pêche). Cet accord ne profite même pas aux pêcheurs marocains qui mettent en cause l’insuffisance (ou la difficulté) des contrôles et estiment que « cet accord n’est qu’une ponction de la ressource halieutique nationale ».

Un moyen de pression

Le Maroc se sert de l’accord de pêche et des accords de prospection avec les compagnies pétrolières comme moyen de pression pour essayer de faire entériner l’occupation illégale du Sahara Occidental et amener les Etats membres les plus concernés (par exemple l’Espagne en matière de pêche) à avoir une position plus conciliante. Comme l’avait souligné fort justement Mohamed Sidati, représentant du Polisario pour l’Europe, au cours d’un colloque de juristes en avril 2001 : « Toute exploitation des richesses naturelles donne un aval politique à la situation d’occupation que connait le Sahara Occidental, et renforce la puissance occupante, à savoir le Maroc, dans son refus de toute solution négociée et respectueuse du droit ».

Trente ans d’exil, quatorze ans de plan de paix non appliqué, le peuple sahraoui aspire, d’une part à pouvoir enfin décider démocratiquement de son avenir par un referendum d’autodétermination, d’autre part à contrôler l’exploitation et l’utilisation de ses ressources naturelles pour satisfaire ses besoins et non au profit de pays tiers, de firmes transnationales ou de militaires mafieux.

La question des ressources naturelles est un symbole fort de l’occupation illégale du Sahara Occidental par le Maroc. Elle doit être au coeur du combat mené par les comités de soutien pour faire respecter la légalité internationale. Dans cette optique, il faut demander au Conseil de l’Union européenne et au Parlement européen de ne pas ratifier l’accord de pêche avec le Maroc s’il n’est pas révisé avec une délimitation exacte des zones de pêche excluant les eaux territoriales sahraouies.

Autre priorité, il faut développer les interventions auprès des pays et des firmes qui exploitent illégalement les richesses naturelles du Sahara Occidental. Des résultats ont déjà été obtenus avec le retrait de fonds de pension suédois de la société pétrolière Kerr McGee , le retrait de Total des accords de recherche pétrolière ainsi que les décisions du gouvernement norvégien : arrêt de tout achat de phosphates provenant du Sahara Occidental, retrait de tous ses avoirs d’une compagnie pétrolière effectuant des recherches au Sahara Occidental.

De leur côté, les autorités de la RASD ont répliqué à ces accords illégaux par la signature de contrats de prospection pétrolière avec des firmes internationales qui seront mis en oeuvre dès que le peuple sahraoui aura retrouvé sa souveraineté sur son territoire.

Pour atteindre ce but, il est urgent de multiplier les interventions à tous les niveaux pour que les Nations-Unies arrêtent de tergiverser et s’impliquent véritablement pour faire appliquer le plan de paix. Pour ce faire, il faut étendre le rôle de la MINURSO (actuellement exclusivement chargée de contrôler le cessez-le-feu) à la protection de la population sahraouie contre la répression des forces d’occupation et au contrôle international des ressources naturelles. La communauté internationale a le devoir de préserver ces ressources tant que le peuple sahraoui n’est pas en mesure de les prendre en charge. Cette extension du rôle de la MINURSO doit aller de pair avec l’extension du mandat des Nations-Unies pour qu’elles ne se contentent plus de rechercher un accord entre les parties « mutuellement acceptable » mais, vu le refus exprimé clairement et publiquement par le Maroc, qu’elles utilisent l’article 7 de la Charte des Nations-Unies pour imposer le plan de paix avec la possibilité de sanctions en cas de refus.



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