Éternuements mortels

mardi 29 septembre 2009
popularité : 3%

On nous l’annonce depuis plusieurs mois. Elle rôde à la manière d’une terrible menace, prête à engloutir l’ensemble de l’humanité Le spectre des épidémies de l’an mille risque à tout moment de s’abattre sur nos démocraties déjà fragilisées par la crise. L’ennemi est enfin clairement identifié…

Balayés les soviétiques, Ben Laden, Al Quaïda et tous les terroristes déstabilisants nos nobles institutions… La grippe A (H1N1), en embuscade, saute sur nos chères têtes blondes. Déjà six victimes en métropole, alors que l’automne n’en est qu’à ses balbutiements. Conscient du danger, le gouvernement multiplie les messages. “Mouchez-vous bande de cons !” “Et si vous n’avez pas de kleenex, répandez-vous sur la manche de votre chemise !” Le message précise qu’il faut jeter le dit kleenex, mais ne note pas s’il faut se débarrasser de la chemise souillée. Tous à poil dans le métro, reniflant dans les plis de nos jupes ou de nos pantalons, ça aurait quand même de la gueule !

Hygiéniste, populiste, anxiogène et totalitaire, la campagne contre la grippe A est un nouvel avatar du fascisme rampant. Il est bien sûr l’occasion de tester quelques nouveaux médicaments dont les brevets sont aux mains des grands laboratoires pharmaceutiques, mais aussi de tester, en grandeur nature, la passivité de la population face à une catastrophe annoncée. La campagne contre la grippe A n’est en fait que le prolongement de l’exploitation de la destruction des deux tours jumelles à New-York. Il faut de sensationnel, de la peur, une menace qui nous détourne de notre combat quotidien contre les attaques réelles dont nous sommes victimes et en premier lieu au niveau social

Campagne hygiéniste

“Se couvrir la bouche et le nez avec un mouchoir en papier vous toussez ou vous éternuez ; le jeter ensuite dans une poubelle fermée et se laver soigneusement les mains… Se laver les mains régulièrement avec du savon ou une solution hydroalcoolique, en comptant jusqu’à 30. Évitez tout contact avec une personne malade.”
Il ne suffit pas de prendre des précautions pour éviter la maladie — précautions vilipendant nos us et coutumes d’êtres vils et sales —, il nous faut nous éloigner des autres ! L’ennemi n’est plus le microbe, mais celui qui le transmet. ce n’est plus de la maladie dont nous devons nous défier, mais du malade. Et nous sommes forcément coupables puisque par nos comportements nous favorisons la contamination.
La grippe A est non seulement un vecteur pour nous imposer des comportements et des modes de vie, mais aussi un carcan social interdisant l’échange social. Bref, cette grippe dont on connaît mal les effets et le mode de propagation, est une aubaine pour imposer l’ordre moral. Après le Sida qui interdit tout rapport sexuel non protégé, la grippe A nous interdit de nous rouler un patin !

Une manne pour les groupes pharmaceutiques

Si la grippe porcine est devenue une nouvelle étape de l’ordre moral qui fait du baiser un danger sanitaire, elle est aussi l’occasion pour certains groupes pharmaceutiques de faire de très gros profits. 94 millions de doses de vaccin ont été commandés par le gouvernement français auprès de quatre laboratoires (Sanofi, Novartis, GlaxoSmithKline et Baxter) pour un coût d’environ 1 milliard d’€uros.
Aux États-Unis ce sont plusieurs centaines de millions de doses qui ont été réservées (dont 75,3 millions au seul groupe français Sanofi). De plus, la loi “Prep Act” (législation sur la préparation et les urgences publiques), protège tout laboratoire pharmaceutique américain contre les effets indésirables sur les personnes vaccinées contre le virus H1N1. Cette loi adoptée par le Congrès en décembre 2005 concernait la “grippe aviaire”. Signée par Georges Bush, son application s’étendait du 1er décembre 2006 au 28 février 2010. Remise au goût du jour en prévision d’une nouvelle pandémie, la loi visant à protéger de toute poursuite judiciaires les fabricants de vaccins s’étend désormais jusqu’au 31 mars 2013.
La campagne vaccinale (qui n’a pas encore débutée) aux États-Unis à un précédent. En 1976, Gérald Ford, alors Président des USA, donne son feu vert à un programme national de vaccination, alors que la grippe H1N1 (déjà) a frappé un soldat du New Jersey. 48 millions de personnes sont vaccinés, ce qui provoque le développement du syndrome de Grillain-Barré, une maladie rare neuro-dégénérative provoquant la paralysie des membres inférieurs. 532 vaccinés en seront atteints et 25 en mourront.

70 pays se disent prêts à lancer une campagne de vaccination, invoquant la possible mutation du virus et faisant référence à la pandémie de grippe espagnole en 1918-1919. Au delà des chiffres, à donner le vertige, des bénéfices attendus par les principaux laboratoires, les effets indésirables de la vaccination sont aujourd’hui largement inconnus. La pandémie est enfin l’occasion de tester en grandeur nature la démolition du code du travail, la privatisation de l’enseignement et la mise en place d’un état d’exception…

La fin du droit du travail

Depuis la fin du mois d’avril, le “centre interministérielle de crise” se réunit chaque semaine autour de Brice Hortefeux, ministre de l’intérieur, pour assurer “la continuité du service public et prévenir l’absentéisme”. Cette cellule de crise a déjà prévu, au niveau de la justice, de généraliser le juge unique en correctionnelle, de développer le huis clos, de prolonger le temps de garde à vue et de porter la détention provisoire de 4 à 6 mois. Non content de se saisir du virus pour imposer une justice d’exception, le gouvernement envisage de modifier en profondeur le code du travail pour éviter une paralysie de l’économie.
Vieux serpent de mer, qui dans un premier temps concernait les femmes enceintes (vous vous souvenez de Rachida Dati ?), le développement du travail à domicile, même dans les périodes de maladie, devient un thème récurrent. Il est de plus fait appel à la polyvalence et à la solidarité nationale. Une caissière de supermarché pourrait ainsi faire le ménage et aider à décharger les camions de livraison pour faire face à l’absentéisme dû à la pandémie. De même, les fonctionnaires n’appartenant pas à l’Éducation nationale, échappés du terrible fléau, pourraient s’occuper des enfants valides dont l’école aurait été fermée pour raisons sanitaires.

Si les scénarios restent ouverts quant au rythme des changements des fondamentaux qui structurent notre société “démocratique”, la grippe A est une aubaine pour écraser le mouvement social. La fermeture systématique d’une classe, voire d’une école, dès que trois cas de grippe se présentent, déstabilise l’ensemble du corps enseignant et permet à quelques officines de présenter leurs cours sur Internet. Ainsi, cette pandémie, aujourd’hui encore largement fantasmée, représente un laboratoire d’une société totalitaire où seules les puissances d’argent peuvent répondre à la crise. Le roman de Georges Orwell n’est plus une fiction. Nous le vivons tous les jours.
Que faire ?
Je crois bien que je vais aller me moucher…



Commentaires

Sites favoris


20 sites référencés dans ce secteur