Le mot magique

lundi 5 décembre 2005
par  Charles Hoareau
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Avant, dans des temps lointains, mais pas trop quand même, la langue française s’embarrassait inutilement de mots différents et fort nombreux pour désigner une seule et même personne quand celle-ci faisait appel à un service public.

Ainsi on était tour à tour usager aux PTT ou à EDF contribuable aux impôts, allocataire à l’Assedic ou à la CAF assuré à la Sécu, malade à l’hôpital, voyageur à la SNCF ou à la RTM, administré à la mairie.....bref un vrai casse tête.

Comment s’y connaître et comment a-t-on pu survivre ? On se le demande bien !

Cela devenait intenable, il fallait trouver une solution ! Eh bien on a fini par la trouver cette solution ! On a inventé le mot magique !

Le mot magique qui peut remplacer tous ces archaïsmes administratifs, le mot qui nous délivre de l’angoisse du vocabulaire excédentaire, le mot qui nous sauve de l’oubli de mémoire ( comment on dit déjà pour celui qui s’adresse à la DDE ou à une banque nationalisée ?), le mot qui range au tiroir des affaires usagées d’un seul coup d’un seul tous les termes surannés et encombrants, le mot qui nous évite l’Alzheimer précoce, bref le mot de la délivrance, le magnifique, l’incomparable, le mot qui fait que l’on se sent seul, unique, irremplaçable, le mot Client !

Voilà le mot magique on est tous des clients ! Ah la belle invention ! Ah qu’il est doux de se sentir le client attentionné de tant de gens, institutions, services et commerces réunis !!

Cela me rappelle le droguiste de mon quartier au temps où il y avait dans tous les quartiers de Marseille des droguistes et des marchands de disques, des cordonniers et des quincailliers, des poissonniers et des marchands de glace...et des services publics de proximité, mon droguiste donc qui posait une question incongrue en guise de réponse à un slogan des années 60 qui accompagnait l’implantation de chaque hyper ou supermarché en même temps que disparaissaient des centaines de boutiques forcément inutiles et démodées.

« Ici le client est roi ? Mais roi des quoi ? Ils ne le disent pas de quoi on est les rois !!! »

Etre ou ne pas être le roi des quoi, telle est la question à laquelle le mot magique ne répond malheureusement pas.

Mais du moment qu’on paye... les supermarchés nouvelle formule de la communication, de la santé, de l’énergie... sauront bien nous vendre quelque chose tant la concurrence sauvage est rude.

A moins que nous refusions chacun le mot magique, et préférions en revenir aux bons vieux barbarismes qui pourraient s’avérer porteurs d’avenir...



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