Sondages très spécieux

dimanche 23 décembre 2007
popularité : 3%

Cinq sondages concernant la réforme des « régimes spéciaux » ont été publiés avant la grève du 18 octobre dernier. Le principe de la réforme n’a été évoqué que dans une question relative à l’alignement des régimes spéciaux de retraite sur le régime de la fonction publique. Elle a été posée dans deux sondages (BVA -Le Figaro - LCI et Ifop-Metro).

En dehors de cette question, les personnes qui ont accepté de répondre aux enquêteurs ont été interrogées pour savoir si elles trouvaient la grève justifiée ou non, ou, variante, si elles soutenaient le mouvement (CSA-L’Humanité). D’autres énoncés du type « Qui du gouvernement ou des syndicats est le plus moderne ? » nous ont assurément un peu éloigné de l’objet du conflit...

La deuxième vague de sondages commandés à la veille de la grève du 14 novembre organise un bras de fer entre syndicats et gouvernement, arbitré par des journaux télévisés caricaturalement hostiles aux grévistes. Dans les cinq enquêtes réalisées, aucune question n’a fait référence aux mesures de la réforme ni au sujet des retraites. Et trois relevaient du pronostic. Par exemple : « Selon vous, ce conflit et ces grèves vont durer... un ou deux jours ? quelques jours ? une semaine ? deux semaines ou plus ? » (Ifop-Metro)

L’appréciation du caractère (justifié ou non) du mouvement a fait l’objet de trois enquêtes (Ifop-Metro, BVA - Les Echos - BFM, Opinion Way - Le Figaro). Les autres sondages ont traduit une logique d’affrontement, accentuée par le caractère fermé des questions posées. Ainsi, LH2 a demandé aux Français, pour le compte de Libération, s’ils se sentaient « du côté des grévistes et des manifestants » ou « du côté de Sarkozy et du gouvernement ». Opinion Way, pour Le Figaro, et BVA, pour L’Express et Orange, ont préféré sonder les personnes qui acceptaient de répondre sur leur pronostic, ou sur leur souhait : le gouvernement allait-il céder aux grévistes ?

La mise en avant et le matraquage d’autres questions (et donc d’autres réponses) auraient pu susciter une interprétation différente du sentiment de l’« opinion publique ». Ainsi, dans le sondage BVA du 18 septembre dernier, 49 % des personnes interrogées se déclaraient plutôt d’accord et 44 % plutôt pas d’accord avec l’énoncé : « La réforme est dangereuse car elle constitue une première étape avant une remise en cause plus générale du système de retraite actuel. » Et, puisqu’il s’agissait de l’âge de départ à la retraite des salariés des régimes spéciaux, les instituts de sondage et leurs commanditaires auraient également pu demander aux Français à quel âge ils souhaitaient eux-mêmes arrêter de travailler.

Un sondage CSA l’a fait... le 7 juin 2006.

Il apparaissait alors que 3 % des personnes interrogées souhaitaient partir à la retraite avant 50 ans, 38 % entre 50 et 55 ans, 38 % entre 56 et 60 ans, 12 % entre 61 et 65 ans, 3 % au-delà de 65 ans.
L’écart entre une telle aspiration et les orientations de politique publique n’a pas fini de se creuser...

Par Antoine Rémond dans Le Monde diplomatique de décembre 2007

Transmis par Linsay.

79% des français souhaitent donc partir à la retraite avant 60 ans ! CQFD



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