SMIC à 1 500 € : les « oublis » de Ségolène...

dimanche 1er avril 2007
popularité : 4%

La France compte plus de 7 millions de personnes pauvres au sens des critères retenus par l’union européenne - 60% du revenu médian, soit environ 780€ par mois - et 2 540 000 salariés sont payés au SMIC, soit 16,8 % des salariés du secteur privé, hors entreprises agricoles et intérim.

Les personnes rémunérées au SMIC (1254€ bruts mensuels sur la base de 35 heures hebdomadaires) se retrouvent, pour plus de la moitié d’entre elles, dans les entreprises de moins de 20 salariés (34 % dans les entreprises de moins de 10 salariés, 18,6 % dans les entreprises de 10 à 20 salariés et 7,8 % dans les entreprises de plus de 500 salariés).

De nombreux autres salariés vivent également de façon très précaire de leur travail : 30% des salariés à temps plein (hors intérim) touchent un salaire inférieur à 1,3 SMIC (moins de 1 630 €). Moins mal lotis, mais loin d’être aisés, près de la moitié de l’ensemble des salariés, soit 8,5 millions de personnes, touchent entre 1,3 et 2 fois le SMIC (entre 1630 € et 2500 €)

Dans son pacte présidentiel, Ségolène Royal fait la proposition N°7 concernant l’augmentation du SMIC : « Le SMIC sera porté à 1500 € le plus tôt possible dans la législature »...

La loi Aubry 2 du 19 janvier 2000 laissait coexister cinq SMIC différents en fonction de la date de passage aux 35 heures et avait institué une garantie mensuelle de rémunération (GMR) assurant au salarié payé au salaire minimum une rémunération mensuelle au moins identique à celle qu’il percevait avant la réduction du temps de travail.

Puis un dispositif de « convergence » sur trois ans avait été mis en place par la loi Fillon du 17 janvier 2003 afin de revenir à un « salaire mensuel minimal » unique selon un mécanisme consistant à aligner progressivement l’ensemble des rémunérations minimales correspondantes au niveau de la garantie la plus élevée.

Ce dispositif s’est achevé le 1er juillet 2005 et depuis cette date, le SMIC unique a fait sa réapparition. Les règles de réévaluation, suspendues pendant trois ans, ont été rétablies et obéissent aux principes suivants :

- Relèvement annuel obligatoire, chaque 1er juillet, en fonction de l’indice des prix à la consommation (hors tabac) et de la moitié de l’augmentation du pouvoir d’achat du salaire horaire de base ouvrier (du premier trimestre de l’année précédente au premier trimestre de l’année en cours)

- Relèvement automatique dès que l’indice des prix à la consommation « hors tabac » des ménages urbains dont le chef de famille est ouvrier ou employé atteint un niveau correspondant à une hausse de 2 % par rapport à l’indice précédemment constaté.

- Relèvement possible, en cours d’année, pour porter le taux du salaire minimum à un niveau différent de celui atteint par les procédures précédentes, si le gouvernement le juge utile.

Depuis le 1er juillet 2006, en fonction de ces critères, le montant horaire brut du SMIC est de :

8,03 € (SMIC horaire au 1er juillet 2005)
x 1,019 (hausse des prix)
x 1,0085 (moitié du gain de pouvoir d’achat)
= 8,25 €
x 1,003 (coup de pouce)
= 8,27 € par heure

ce qui donne un SMIC mensuel brut de 151,67 h x 8,27 € = 1 254,28 € (base 35 h)

Dans son projet « Réussir ensemble le changement », le PS propose de porter « le SMIC au moins à 1 500 euros bruts le plus tôt possible dans la législature ».

Dans son pacte présidentiel, Ségolène Royal indique que « le SMIC sera porté à 1 500 euros, le plus tôt possible dans la législature ». Mais la candidate du PS a précisé début mars à la télévision que ce plafond de 1500 € serait atteint qu’au bout de cinq ans, le SMIC passant ainsi de 1 254 € au 01/07/06 à 1 500€ à la fin de la législature.

Le premier constat qui s’impose, c’est qu’il s’agit d’un SMIC de 1 500 € « bruts » (précision importante, présente dans le projet du PS du congrès du Mans mais ayant curieusement disparu dans le pacte présidentiel de Ségolène Royal...)

Le deuxième constat, c’est que l’expression « le plus tôt possible dans la législature » dans le projet du PS a fait place à l’expression « à la fin de la législature » dans une émission télévisée face au public...

Afin de connaître le montant réel d’un SMIC à 1 500 € bruts, il convient bien sûr d’opérer un calcul concernant les taux de cotisations de droit commun à la charge du salarié, à appliquer sur les salaires bruts au 1er janvier 2007 :

Sécurité sociale :
-  Risque maladie, maternité, invalidité, décès : 0,75 %
-  Risque vieillesse : 6,65 % (jusqu’à 2 682 €)

Contribution au remboursement de la dette sociale
-  CRDS : 0,50%

Contribution sociale généralisée
-  CSG : 7,5%

Retraite complémentaire
-  ARRCO : 3% (jusqu’à 2 682 € pour les non-cadres)

Prévoyance
- Caisse différente suivant les secteurs d’activité : 1% en moyenne

Association pour la gestion du fonds de financement de l’ARRCO
(cotisation destinée au financement du dispositif de retraite à 60 ans dans les régimes de retraite complémentaire) :
-  AGFF : 0,80 %

Chômage
- ASSEDIC : 2,40 %

Après déduction du total des cotisations (22,6%), un SMIC brut de 1500€ correspond en fait à un SMIC net de 1161 €.

A ce stade, un deuxième calcul doit être fait qui concerne le relèvement annuel obligatoire, le 1er juillet de chaque année, en fonction de l’indice des prix à la consommation et de la moitié de l’augmentation du pouvoir d’achat du salaire horaire de base ouvrier (sans compter les traditionnels « coups de pouce » donnés régulièrement chaque année : + 0,3% le 01/07/06).

En considérant d’une part que le taux d’inflation en 2006 soit à peu près celui que nous connaîtrons de 2007 à 2012 (1,6% par an) et que la moitié de l’augmentation du pouvoir d’achat du salaire horaire de base ouvrier soit la même que celle prise en compte le 1er juillet 2006 (0,85% par an), le SMIC obtenu mécaniquement serait d’environ 1450 € bruts le 1er juillet 2012.

La différence entre le SMIC proposé (1500 € bruts, soit 1161 € nets) et celui obtenu automatiquement (1450 € bruts, soit 1122 € nets) est donc pratiquement nulle (50,00 € bruts, soit 38,70 € nets).

Un dernier petit calcul permet enfin de constater que l’augmentation moyenne mensuelle nette pour chaque année de la législature ne serait que de 38,70 € : 5 = environ 7,70 € nets.

7,70 euros de plus à la fin du mois sur la fiche de paie !

Une misère pour tous les « smicards » !

Une insulte envers tous les salariés de ce pays !

Une véritable escroquerie intellectuelle !

En ayant occulté volontairement deux paramètres pourtant essentiels : indexation automatique du SMIC au 1er juillet de chaque année et différence entre salaire brut et net, Ségolène Royal surfe sur l’imprécision et confirme sa volonté de chiffrer le moins possible son programme présidentiel...
Visiblement le PS et sa candidate n’ont pas encore intégré l’idée qu’il convient de revaloriser en priorité le SMIC et les bas salaires qui stagnent depuis 25 ans, en portant le SMIC à 1500 € nets le plus tôt possible au cours de la prochaine législature et dans tous les cas au plus tard à la fin de la législature !

En effet, selon les dernières données de l’enquête sur les conditions de vie des ménages publiée par l’INSEE, près d’un tiers des ménages ne peuvent pas se payer une semaine de vacances une fois par an. Autre source d’inquiétude, les grosses difficultés à se chauffer convenablement passent de 6% des ménages à près de 10% aujourd’hui, avec l’explosion du prix de l’énergie entre 1998 et 2004. Le taux de ménages connaissant des découverts bancaires fréquents progresse lui aussi passant de 6,9% à 8%, etc...

Depuis notamment la suppression de l’échelle mobile des salaires en 1983, dispositif protégeant le pouvoir d’achat des salariés, tous les gouvernements successifs ont leur part de responsabilité dans l’accroissement considérable des inégalités sociales et les difficultés financières que rencontrent aujourd’hui des millions de personnes.

Mais en proposant une augmentation dérisoire du SMIC pour les années 2007 à 2012, sous-estimant ainsi l’importance du pouvoir d’achat, le PS continue de jouer impudemment avec l’espoir des salariés...



Commentaires

Sites favoris


20 sites référencés dans ce secteur