Pourquoi le G8 est inutile pour l’Afrique

mercredi 13 juillet 2005
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Evidemment ces articles (en particulier le premier en document joint) peuvent être sujets à débats,tant sur le constat, que sur les solutions. La question de la nécessité du changement de système économique mondial ne peut être évacuée. De même n’est ce pas les puissances impérialistes qui ont une dette vis à vis de l’Afrique, continent pressuré depuis des siècles ?

Ils n’en restent pas moins un coup de gueule qui donne un autre éclairage sur le G8 et les manifestations afférentes. Ils ont aussi et surtout le mérite de donner le point de vue d’un africain, donc d’un des premiers concernés par la subite « générosité » des maîtres du monde

Je tiens à remercier toutes les personnes, très nombreuses, qui m’ont témoigné leur sympathie et m’ont envoyé leurs encouragements après avoir lu mon coup de gueule sur la dignité de l’Afrique : « Pour la dignité de l’Afrique, laissez-nous crever ». ( voir document joint attaché à l’article) Je les assure que j’ai lu avec intérêt chaque réaction et les idées toujours pertinentes contenues me serviront pour des analyses futures. Vos approbations de mes thèses en majorité me confortent dans la conviction qui toujours été la mienne. A savoir que, sans se perdre dans un « romantisme autarcique », le destin de l’Afrique dépend de ses enfants qui seront en dernière analyse les seuls à décider de son devenir.

Ainsi, la moisson de la campagne de mendicité de Gleneagle, où se réunissaient les puissants de ce monde, est bien maigre pour les dirigeants africains promoteurs de cette démarche : Des promesses tout ce qu’il y a d’évasives et confuses. De quoi donner raison au colonel Mouarmar Kadhafi, un leader que les africains devraient apprendre à connaître, qui déclarait : « Demander au G8 d’annuler la dette n’assurera pas l’avenir de l’Afrique. Mendier n’assurera pas l’avenir de l’Afrique ». Et il faut dire qu’une fois de plus, « le crime médiatique » que dénonçait Christian d’Alayer, est passé par là.

Selon l’agence britannique Reuters, « les 8 se fixent 2010 pour horizon en vue d’une augmentation globale de l’aide publique au développement d’environ 50 milliards de dollars chaque année ». Mais d’après l’agence américaine Associated press, « L’APD va être progressivement augmenté jusqu’en 2010 pour s’élever à 50 milliards de dollars de plus qu’en 2004 soit 100 milliards de dollars ». Une autre dépêche de cette agence révèle : « Le G8 a décidé de doubler l’APD à l’Afrique pour la porter à 50 milliards de dollars soit 42,08 milliards d’Euros ». L’agence Reuters soutient que « les dirigeants des 8 pays les plus riches de la planète se sont engagés à porter l’aide financière en faveur de l’Afrique à 50 milliards de dollars par an d’ici 2010 ». Selon l’agence France Presse (AFP) enfin, « les 50 milliards de dollars d’aide au développement supplémentaires annoncés par le G8 permettront ainsi de sauver 600 000 personnes de la malaria ».

Entre « d’ici 2010 », « jusqu’en 2010 », « horizon 2010 ». Entre « 50 milliards » , « 100 milliards » annoncés par l’Associated Press ou encore les « 50 milliards supplémentaires » de l’AFP, la confusion est totale et bien malin celui qui réussira à dire avec exactitude ce que les puissants ont décidé à Gleneagle à propos du combat contre la pauvreté en Afrique.

Voilà comment les membres du G8 qui ont pourtant signé un communiqué à l’issue de leur réunion procèdent par manipulation de l’information dès la source qui est l’agence de presse lorsqu’il s’agit de l’Afrique. Ils sont aidés en cela par certains médias qui de façon passive ou active complotent contre l’Afrique.

La vérité, personne ne la saura jamais parce qu’elle n’existe tout simplement pas. Il s’agissait juste d’un simple effet d’annonce qui repose en plus sur des promesses fallacieuses et mensongères. Pour les plus riches, l’Afrique ne compte même pas pour une vieille chaussette trouée. Une augmentation globale de l’aide au développement de toute l’Afrique est un leurre. Les pays riches préfèrent attendre de voir un pays africain à l’agonie pour lui administrer la perfusion comme la France venait de faire à la République centrafricaine en accordant l’aide à ce pays pour régler la solde de ses fonctionnaires..
Les agences de presse occidentales, sources premières des médias, ont donc fait la sale besogne de manipulation.

Quant à la PANA, l’agence panafricaine de presse de qui on pouvait espérer la vérité, si tant est qu’elle existe en pareille circonstance, elle est restée tout simplement aphone ou muselée. Il faut d’ailleurs dire que depuis au moins une décennie la PANA est presque étranglée par les difficultés économiques.

Le crime médiatique dont il est question ici et qui profite aux puissants de ce monde se situe à trois niveaux :

-  Amplifier la promesse et taire la non réalisation ;

-  Grossir exagérément les catastrophes aussi bien humaines que naturelles qui frappent l’Afrique pour faire valider l’image d’un continent non seulement pauvre et endetté mais aussi maudit et voué à jamais à l’assistance et à la mendicité ;

-  Formater les mémoires des jeunes africains et occidentaux d’après les schémas selon lesquels pour son développement, l’Afrique doit absolument s’arrimer sur le modèle occidental et que toute tentative de développement autonome est vouée à l’échec.

« L’Afrique va mieux mais les problèmes y demeurent immenses notamment la violence, la pauvreté, la faim, la maladie et l’ignorance ». Ce tableau peu reluisant peint par le président français Jacques Chirac à Gleneagles participe de cette logique.

Le sommet de Gleneagles a aussi planché sur la suppression des subventions agricoles dans les pays riches. Il faut souligner que ces subventions sont à l’origine de la non compétitivité des produits agricoles d’origine africaine sur le marché mondial. Selon le communiqué final, les 8 s’engagent « à éliminer toutes les formes de subventions à l’exportation sur les produits agricoles à une date crédible ». Allez comprendre quelque chose à l’opportunité de la crédibilité d’un date. Rien qu’une autre confusion de plus ou de trop versée au tableau déjà si encombré. A Gleneagles, ceux qui croyaient encore au miracle attendaient des solutions concrètes pour sortir l’Afrique de la pauvreté et peut-être pour enfin amorcer son développement. Mais Tony Blair qui recevait les travaux s’est contenté de caresser « l’espoir que la pauvreté peut finir en Afrique ».

Mais le plus attristant pour nous africains c’est que, malgré cette confusion qui crève l’oeil et la vacuité du communiqué final par rapport aux promesses à l’Afrique, le président en exercice de l’union africaine n’a pas hésité à faire le V de victoire à la fin des travaux. En effet, le président nigérian, Olesegun Obasanjo a « qualifié les accords de grands succès ». De deux choses l’une, soit ce sont les lunettes optique qu’il faut remplacer soit la vue s’est un peu plus dégradée. En tout cas il y a quelque chose à changer. Le président Obasanjo est l’un des leaders africains sur qui personnellement je fondais beaucoup d’espoir. D’abord parce qu’en 1979, à l’ère des partis uniques il a eu le mérite de restaurer la démocratie dans son pays et à remettre le pouvoir à un régime civil.

Ensuite parce qu’il a connu l’enfer de la prison sous le tristement célèbre Sani Abacha. Aujourd’hui, je pense que tout ce passé héroïque est en train de fondre comme neige au soleil. J’aimerais bien savoir ce qui est arrivé à l’homme aux mille boubous les uns toujours plus beaux que les autres et à la tunique rabattue.
Le problème c’est la naïveté avec laquelle les dirigeants africains abordent les questions hautement stratégiques que sont les relations nord-sud. Ils y vont avec « le coeur, le sentimentalisme et les larmes ». Alors qu’en face règne la raison, la ruse et le cynisme. Conséquence, ils se parlent mais chacun n’écoute que l’écho de son propre propos.

LE DIALOGUE DES SOURDS

Depuis quelques années, des initiatives les unes toujours plus généreuses que les autres sont prises en faveur de l’Afrique par les puissants de ce monde. Il en est ainsi du « plan Marshall » pour l’Afrique proposé par Blair et qui à ce jour a déjà publié un rapport sur l’état de la pauvreté en Afrique. Il en est de même de la proposition franco-germanique particulièrement soutenue par le président Jacques Chirac et qui se propose d’appuyer le lancement d’un prélèvement international de solidarité sur les billets d’avion pour financer les grandes pandémies en Afrique.

Les Etats Unis pour leur part en partenariat avec Londres, entendent privilégier les partenariats avec le secteur privé africain. Comme on peut le constater, personne ne veut manquer à l’appel de l’aide à l’Afrique.
Cet intérêt subit de l’occident pour le continent africain avait de quoi intriguer et mérite d’être disséqué. De mémoire d’observateur, je n’avais jamais vu autant d’initiatives se croiser et même s’affronter pour le bonheur des africains. C’est pourquoi, j’ai voulu comprendre. Il se trouve tout simplement que l’Afrique est malade et personne ne veut avoir sur la conscience le déclin de cette partie du monde.

Depuis quelques sommets du G8, les dirigeants africains partisans de la mendicité internationale et les puissants de ce monde se retrouvent sur une seule chose : maintenir l’Afrique en vie. L’Afrique ne doit pas crever, c’est le credo. Mais après, les chemins divergent et le dialogue devient celui des sourds. Selon les voeux des dirigeants africains symbolisés par le NEPAD, l’Afrique doit non seulement se relever de sa maladie mais recouvrer toutes ses forces pour s’engager sur les chemins de la prospérité économique. Enclencher le développement qui est le rêve de tout africain équilibré, consiste à prendre un ensemble de mesures aussi bien structurelles que conjoncturelles à même de générer la croissance économique qui en est l’une des conditions majeures.

Mais çà, les riches n’en veulent pas. Il veulent juste se limiter au combat contre la pauvreté. C’est à dire diminuer le nombre de ceux qui vivent avec moins d’un dollar par jour jusqu’à un seuil secret qu’ils sont seuls à connaître. Pour revenir sur l’image du malade, les puissants veulent une Afrique qui recouvre juste quelques forces devant lui permettre de remplir des tâches que lui assigne la division du travail dans le monde selon les puissants. Ces tâches sont au nombre de 4 :

-  La potion qu’on lui fera boire, doit permettre à l’Afrique de continuer la production des matières premières nécessaires aux industries en occident. Elle doit aussi être capable de générer certaines ressources devant servir au financement des campagnes électorales dans certains pays de l’hémisphère nord ;

-  Un revenu modique et une santé même précaire lui sont nécessaires pour consommer les produits importés et s’adonner aux jeux du hasard pour faire ainsi tourner les industries en occident et engraisser les réseaux des jeux ;

-  L’Afrique doit avoir de quoi s’employer pour ne pas continuer à envoyer ses immigrés clandestins se bousculer aux portillons de l’occident ;

-  Toutefois, il faut qu’elle continue d’être un peu malade pour consommer les médicaments des industries pharmaceutiques de l’occident.

Il n’y a qu’à constater que sur les 14 pays africains qui ont bénéficié de l’annulation de la dette, la majorité sont des Etats grabataires. La Somalie par exemple n’existe plus en tant qu’Etat. Il n’est pas question de prendre les mêmes mesures pour le Nigeria ou l’Afrique du sud par exemple pays qui sont, s’ils prenaient leur destin en main, des puissances en devenir.

En fait, les politiques de lutte contre la pauvreté veulent juste amener les pays sinistrés au seuil de 1 dollar par jour par habitant, un seuil de subsistance fixé par le PNUD. D’où les thèses saugrenues de la France qui, ne voulant pas régler les arriérés de pension, indûment retenues, des tirailleurs africains, évoque le fait qu’un flux d’argent trop important en direction de l’Afrique viendrait perturber les équilibres économiques. Le comble de l’infantilisation !

Croire que l’occident des réseaux maffieux s’est subitement pris d’humanisme et a pensé qu’il pourrait changer le destin de l’Afrique, est pire que la myopie : c’est la volonté de ne rien voir. Et puisqu’on ne voit rien, la probabilité est très grande de rencontrer des personnes pas toujours sérieuses qui veulent nous faire prendre des vessies pour des lanternes.

L’IMPOSTURE DE BOB GELDOF

Bob Geldof, c’est l’organisateur des concerts Live 8 qui ont endiablé certaines capitales occidentales à la veille du sommet de Gleneagles. Officiellement, il s’agissait de faire une sorte de lobbying en vue d’obtenir des plus riches de quoi lutter contre la pauvreté en Afrique. Le nom de cet artiste ressort encore dans le Live Aid organisé contre la famine en Ethiopie il y a une vingtaine d’années. Jusque là, tout est cousu de fil doré de générosité. Mais la nature humaine nous a appris que c’est quand c’est trop beau qu’il faut faire très attention. C’est ce que j’ai fait.

Avant leur tenue, j’ai pris le risque de dire que les concerts géants sont une mauvaise chose pour la dignité de l’Afrique. Quelques artistes n’ont pas approuvé au motif qu’il existe une rébellion par la musique, je les comprends. Seulement, aujourd’hui, je suis à l’aise pour affirmer que ces concerts ont été non seulement une campagne d’humiliation savamment orchestrée et dirigée contre l’Afrique, mais aussi une grosse escroquerie à l’échelle planétaire et surtout l’imposture d’un homme : Bob Geldof.

En effet, selon le gratuit d’information « Métro », « les ventes de la dernière compilation de Pink Floyd se sont envolées de 1 343% en une semaine. Le principal disquaire britannique, HMV, note que les ventes des artistes qui ont participé au Live 8 de Londres ont décollé après leur prestation de Samedi ». On comprend pourquoi les organisateurs ont tenu à écarter les artistes africains afin qu’ils ne tirent pas aussi profit des retombées de l’après concert. La peur étant aussi de voir la musique africaine grignoter les parts de marché dans la juteuse et solvable demande occidentale du marché du disque. Les médias entretiennent un silence assourdissant sur les retombés de ces concerts qui logiquement selon ceux qui soutiennent la thèse de la mendicité devraient être reversés à l’Afrique. Mais non, elles continueront à engraisser Bob Geldof et ses acolytes. Il se dégage de cette situation, des images affreuses de prêtre ou éducateur pédophile, de chirurgien vampire ou de sapeur pompier pyromane. En fait, toutes ces personnes qui, sous des apparences généreuses commettent souvent les pires des crimes en exploitant la naïveté et la précarité de leurs victimes.

A Gleneagles, Bob Geldof a presque ravi la vedette aux chefs d’Etat du G8 se payant le luxe de se faire recevoir pendant 40 minutes par Georges Bush. Il a été aussi reçu par Jacques Chirac et par Tony Blair avec lesquels il semblait tellement à l’aise. Normal que, évoquant les conclusions des travaux, il parle de « triomphe » estimant que « justice a été faite ». On aimerait bien savoir pour qui.
A tout prendre, Bob Geldof sert au mieux, d’épouvantail monté par les puissants pour faire le contre poids aux altermondialistes. D’où son propos : « Je veux croire que notre manière de protester est mieux que celle qui consiste à casser des voitures ou des magasins ».Allusion faite aux manifestations des altermondialistes qui s’étaient déroulés à Edimbourg quelques jours auparavant et au cours desquelles il y a eu plusieurs arrestations.

Au pire Bob serait un imposteur qui n’hésiterait pas à solliciter le prix Nobel pour son action en faveur du développement de l’Afrique.

Selon toute vraisemblance, il se trouverait tout simplement qu’ayant constaté que ses ressources engrangées grâce aux retombées de la campagne pour la famine en Ethiopie s’amenuisant, Bob Geldof a voulu doper pour 20 années encore, ses ventes et celles de ses amis et s’assurer ainsi une retraite dorée... sur le dos de l’Afrique

Etienne de Tayo
Journaliste
Promoteur du réseau des journaliste pour l’intégration en Afrique « Afrique Intègre »



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